Du positif, enfin, après des mois de doutes sur la capacité de l’Ukraine à tenir ses engagements et sur la peur de voir l’Euro revenir à la seule Pologne. Mais vendredi dernier, le comité exécutif de l’UEFA a confirmé que la finale du prochain Euro se jouera bien à Kiev, et que Lviv, Donetsk, Karkhiv, trois autres villes ukrainiennes, accueilleront des matchs. « En 2007, quand le comité a choisi l’Ukraine et la Pologne, nous voulions ouvrir le football à l’Est, et aider ces deux pays à se développer, rappelle Michel Platini. Je suis fier de voir le chemin parcouru, c’est une belle journée pour la Pologne et l’Ukraine. »
Grigory Surkis, président de la Fédération ukrainienne de football, qui fait face depuis deux ans aux critiques de la presse internationale, savoure l’instant : « Je me sens comme un entraîneur après un match difficile, mais qui se termine bien. Il y avait des obstacles, mais nous les avons surmontés avec héroïsme. C’est sans doute la manière ukrainienne de faire les choses ! » Ironique, l’ancien président du Dymamo de Kiev appelle à éliminer « le complexe d’infériorité » de la société ukrainienne et à « travailler ensemble ».
L’Ukraine a le triomphe modeste, consciente de l’ampleur du chantier, et des difficultés qu’elle a eues à gagner la confiance de l’UEFA. La fédération européenne a multiplié les ultimatums cette année vis-à-vis de la partie ukrainienne. « A mon avis, c’était très risqué de confier l’Euro 2012 à la Pologne et à l’Ukraine, estime Sergeï Polhovski, journaliste sportif ukrainien renommé. Nous ne sommes pas prêts, nous avons des bagarres politiques permanentes et nous vivons un désastre économique. L’UEFA doit donc se préparer à des pertes financières et je crois que l’Ukraine n’atteindra pas les buts inscrits dans son programme présenté à Cardiff, qui envisageait la construction d’autoroutes, d’hôtels, d’aéroports… C’est déjà bien si les stades sont prêts aux dates prévues. »
Pour l’instant, seuls deux stades sur quatre ont été inaugurés, et l’on attend toujours la confirmation des quarts de finales à Donetsk, où manquent chambres d’hôtels et infrastructures autour de l’aéroport. Plus généralement, du temps et beaucoup d’argent ont été perdus dans des appels d’offres douteux et nombre d’observateurs craignent que la corruption qui gangrène le milieu des affaires ukrainien ne freine les investissements dans le pays. « Avec le temps et la crise économique, il était important de mettre les deux pays en garde sur les délais à tenir, a concédé Michel Platini. On a eu peur par moments, mais l’Ukraine comme la Pologne ont fait de très gros efforts par ces temps difficiles. »
Chez les spectateurs kiéviens, rassemblés autour du logo géant, la joie le disputait cependant au scepticisme. Vassili, 19 ans, est ainsi « fier de pouvoir montrer au monde ce que les Ukrainiens valent ». Il dit aussi son agacement devant l’élite politique, qui n’a « rien fait » pour supporter l’organisation du futur championnat : « J’aime le football mais je sais que ce ne sera qu’un demi-Euro car nous ne serons pas prêts. » Pour sauver la face, l’UEFA pouvait pourtant difficilement faire marche arrière. Faute d’infrastructures suffisantes, elle pourrait se contenter d’un Euro minima, concentré sur les sportifs et leurs délégations, bien loin des grandes fêtes populaires des dernières éditions.
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