De retour de congé en France, nous voici replongés "plein gaz" dans la crise russo-ukrainienne, avec une nouvelle journée de rebondissements dans le bras de fer gazier qui oppose les deux pays.
Résumé de cette journée, avec un article publié mercredi 14 dans Le Temps:
Dans le conflit gazier avec Gazprom, l'Ukraine recourt à l'arme du transit
ENERGIE. Malgré l'accord signé sous la pression de l'Union européenne, les livraisons de gaz vers l'Europe n'ont pas repris.
Les Européens ont voulu croire que la partie était jouée, lundi, lorsque Russes et Ukrainiens se sont mis d'accord pour reprendre la livraison de gaz vers l'Europe. Et mardi matin, le précieux combustible coulait à nouveau vers l'ouest, sous la surveillance de plusieurs dizaines d'observateurs internationaux, déployés sur le trajet des gazoducs. Mais coup de théâtre en fin de matinée: les volumes de gaz mis en circulation par Gazprom sont beaucoup plus faibles que prévu, s'inquiète la Commission européenne. La Russie, aussitôt, accuse les Ukrainiens d'entraver le flux, mais ces derniers se défendent en renvoyant la faute sur Gazprom: les volumes de gaz mis en circulation, trop faibles, ne suffiraient pas à garantir la pression nécessaire à l'acheminement du gaz dans les gazoducs. Pour Kiev, c'est à Gazprom de fournir cette quantité de gaz dit technique, ce que refusent catégoriquement les Russes.
Le jeu de poker menteur, passe-temps favori de l'Ukraine comme de la Russie, a donc repris. Selon certains observateurs à Kiev, la Russie aurait effectivement repris les livraisons, sous la pression de l'Union, mais à minima, afin de placer encore une fois l'Ukraine dans le rôle de l'empêcheur d'exporter en rond. L'Ukraine, elle, pourrait avoir la tentation de faire traîner les choses, par crainte de se retrouver seule face à Moscou, en cas de reprise du trafic avec l'Europe.
Car pour l'Ukraine, malgré les signes positifs qu'a voulu voir l'Union européenne ces derniers jours, rien n'est réglé, ni les négociations sur le prix du gaz, ni celles sur le coût du transit. «L'Europe, en voulant à tout prix rétablir le transit, est égoïste, assène Volodymir Saprykin, spécialiste ukrainien de l'Institut Razumkov. Nous n'aurions jamais dû séparer la question européenne de la question ukrainienne. Car sans l'arme du transit, l'Ukraine ne pèse plus rien dans ses négociations avec la Russie.»
L'Ukraine est dépendante à 85% du gaz russe. Pour l'instant, le pays tient bon dans le bras de fer, grâce à des réserves estimées à 16,5 milliard de m3, et à quelques gisements sur son territoire. De quoi passer l'hiver, selon les autorités. Malgré tout, les premiers signes de faiblesse se font sentir, notamment dans le secteur de l'industrie, très gourmand en énergie. Et la presse ukrainienne annonce des pénuries de chauffage dans les semaines à venir. Mais Kiev veut encore y croire, et tente de renverser des accords commerciaux avec Gazprom qui lui sont pour l'instant défavorables. «Dans tous les cas, l'économie ukrainienne n'a pas les moyens de payer le gaz au prix du marché, rappelle Volodymir Saprykin. Elle tente donc de rogner sur ce qu'elle peut.»
Encore une fois, la division de la classe politique ukrainienne joue contre les intérêts du pays. Depuis le début de la crise, le président Viktor Iouchtchenko feint en public l'union sacrée avec sa première ministre Ioulia Timochenko. Mais dans la presse, le secrétariat présidentiel mène la charge contre la cheffe du gouvernement, accusée de faire le jeu de son homologue russe Vladimir Poutine, en vue d'un soutien pour la prochaine présidentielle. Les forces d'opposition, menées par Viktor Ianoukovitch, ne sont pas en reste. Hier au parlement, le Parti des régions a demandé la démission du président et a annoncé vouloir lancer une procédure de destitution.
Les Ukrainiens voient derrière ces querelles une simple affaire de gros sous. Car c'est toute la classe politique qui est jugée responsable de la crise gazière actuelle, pour avoir entériné année après année l'opacité structurelle du système gazier russo-ukrainien. En témoigne la persistance de la compagnie RosUkrEnergo. Cette société, qui sert d'intermédiaire entre la Russie et l'Ukraine pour la distribution du gaz, est très décriée. Basée à Zoug, en Suisse, elle est détenue à 50% par Gazprom et à 50% par deux hommes d'affaires ukrainiens, très proches des milieux politique et économique ukrainiens et russes. Viktor Iouchtchenko, Viktor Ianoukovitch et Ioulia Timochenko, les trois grandes figures de la scène politique ukrainienne depuis 2004, ont tous trois échoué à faire la lumière sur cette société et ses réseaux, et personne ne semble avoir de véritable intérêt à l'assainissement du système énergétique ukrainien.
Le jeu de poker menteur, passe-temps favori de l'Ukraine comme de la Russie, a donc repris. Selon certains observateurs à Kiev, la Russie aurait effectivement repris les livraisons, sous la pression de l'Union, mais à minima, afin de placer encore une fois l'Ukraine dans le rôle de l'empêcheur d'exporter en rond. L'Ukraine, elle, pourrait avoir la tentation de faire traîner les choses, par crainte de se retrouver seule face à Moscou, en cas de reprise du trafic avec l'Europe.
Car pour l'Ukraine, malgré les signes positifs qu'a voulu voir l'Union européenne ces derniers jours, rien n'est réglé, ni les négociations sur le prix du gaz, ni celles sur le coût du transit. «L'Europe, en voulant à tout prix rétablir le transit, est égoïste, assène Volodymir Saprykin, spécialiste ukrainien de l'Institut Razumkov. Nous n'aurions jamais dû séparer la question européenne de la question ukrainienne. Car sans l'arme du transit, l'Ukraine ne pèse plus rien dans ses négociations avec la Russie.»
L'Ukraine est dépendante à 85% du gaz russe. Pour l'instant, le pays tient bon dans le bras de fer, grâce à des réserves estimées à 16,5 milliard de m3, et à quelques gisements sur son territoire. De quoi passer l'hiver, selon les autorités. Malgré tout, les premiers signes de faiblesse se font sentir, notamment dans le secteur de l'industrie, très gourmand en énergie. Et la presse ukrainienne annonce des pénuries de chauffage dans les semaines à venir. Mais Kiev veut encore y croire, et tente de renverser des accords commerciaux avec Gazprom qui lui sont pour l'instant défavorables. «Dans tous les cas, l'économie ukrainienne n'a pas les moyens de payer le gaz au prix du marché, rappelle Volodymir Saprykin. Elle tente donc de rogner sur ce qu'elle peut.»
Encore une fois, la division de la classe politique ukrainienne joue contre les intérêts du pays. Depuis le début de la crise, le président Viktor Iouchtchenko feint en public l'union sacrée avec sa première ministre Ioulia Timochenko. Mais dans la presse, le secrétariat présidentiel mène la charge contre la cheffe du gouvernement, accusée de faire le jeu de son homologue russe Vladimir Poutine, en vue d'un soutien pour la prochaine présidentielle. Les forces d'opposition, menées par Viktor Ianoukovitch, ne sont pas en reste. Hier au parlement, le Parti des régions a demandé la démission du président et a annoncé vouloir lancer une procédure de destitution.
Les Ukrainiens voient derrière ces querelles une simple affaire de gros sous. Car c'est toute la classe politique qui est jugée responsable de la crise gazière actuelle, pour avoir entériné année après année l'opacité structurelle du système gazier russo-ukrainien. En témoigne la persistance de la compagnie RosUkrEnergo. Cette société, qui sert d'intermédiaire entre la Russie et l'Ukraine pour la distribution du gaz, est très décriée. Basée à Zoug, en Suisse, elle est détenue à 50% par Gazprom et à 50% par deux hommes d'affaires ukrainiens, très proches des milieux politique et économique ukrainiens et russes. Viktor Iouchtchenko, Viktor Ianoukovitch et Ioulia Timochenko, les trois grandes figures de la scène politique ukrainienne depuis 2004, ont tous trois échoué à faire la lumière sur cette société et ses réseaux, et personne ne semble avoir de véritable intérêt à l'assainissement du système énergétique ukrainien.
En version radio, un article sur le site de RFI.FR, et des papiers audio tout au long de la journée, notamment sur France Culture:
Téléchargement Fcult18H gaz 130109
Téléchargement FCult 07h Gaz 140109
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