Au Kirghizistan, autre république ex-soviétique, près de 10 000 personnes manifestent à nouveau, depuis hier, contre le président Bakiev.
BISCHEK (de notre correspondante).- ہ Bishkek, la capitale, on rejoue les scènes de manifestations de novembre dernier : mêmes têtes sur les estrades, même ronde de yourtes pour passer la nuit, mêmes drapeaux... Avec pourtant une différence de taille. Félix Koulov, l'ancien premier ministre porté au pouvoir avec le président Bakiev lors de la « Révolution des tulipes » en mars 2005, a changé de camp. Lâché par le président en décembre, il crie aujourd'hui à la trahison, se refaisant ainsi une virginité politique à peu de frais.
« Félix Koulov ne veut plus attendre, il veut y aller maintenant », résume Roza Atumbaeva, ex-diplomate et membre de l'opposition. Derrière lui, c'est le « Front uni », rassemblant les opposants les plus radicaux, qui retrouve son souffle, après le demi-échec des manifestations de novembre. En effet, la nouvelle Constitution adoptée alors sous la pression de la rue a été, depuis, remplacée par un texte à la convenance du Président.
Bakiev, bien déterminé à sauver sa place, a réagi. Fin mars, il nomme au poste de Premier ministre Almaz Atambaev, l'un des leaders de novembre, afin de s'attacher une partie de l'opposition modérée. Mardi soir, Bakiev fait même son mea culpa à la télévision nationale, promettant de céder une large partie de son pouvoir au Parlement.
Pour faire face, l'opposition a donc besoin d'un fort soutien populaire dans les jours à venir. En guise de symbole, elle a d'ores et déjà mobilisé 70 grévistes de la faim. Enfin, dans les montagnes proches de Bishkek, l'opposition a rassemblé des centaines de cavaliers, réunis pour un tournoi de Kok Boru, polo traditionnel d'Asie centrale, où une carcasse de chèvre fait office de ballon. Talas Tolunaev, l'un des participants, l'avoue sans fard : « Si Bakiev utilise la force contre l'un des nôtres, on descend avec nos chevaux sur Bishkek. » Une réserve musclée sur laquelle l'opposition pourrait bien s'appuyer en cas d'enlisement du conflit. Au Kirghizistan, la fin du jeu est encore loin.
Mathilde GOANEC.
La photo n'a pas ete publiee dans Ouest-France.
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