En guerre contre la corruption qui gangrène son pays, Ioulia Timochenko, la Premier ministre d’Ukraine, demande la tête du maire de Kiev. Suivant ses recommandations, le Parlement a convoqué une élection municipale anticipée dans la capitale le 25 mai. Un scrutin qui a toutes les chances de se transformer en référendum pour ou contre l’actuel maire de la ville, Léonid Tchernovetski, un oligarque haut en couleur soupçonné de malversation mais toujours populaire.
L’égérie de la «Révolution Orange» (en 2004) est inflexible. «Dire qu’il n’y a pas de corruption à la mairie de Kiev équivaudrait à dire qu’il n’y avait pas de sexe à l’époque soviétique» , a-t-elle déclaré, imperturbable. Léonid Tchernovetski n’a pas tardé à contre-attaquer. Destitué par les députés, il a annoncé son intention de se porter candidat à sa propre succession. Et qualifié sa mise à l’écart d’«absolument illégale».
L’homme a de la ressource car il n’en est pas à son premier scandale. En 2006, il avait créé l’événement, en ravissant la mairie à un ancien apparatchik. On l’avait alors vu distribuant des paquets de céréales à des grands-mères dans le besoin. On le dit très proche d’une secte protestante, très bienveillante vis-à-vis de la richesse qu’il a fait fructifier à Kiev.
Car Léonid Tchernovetski est riche, très riche, et l’affiche sans complexe, dans le style tapageur des oligarques, à grand renfort de vêtements de luxe et de voitures hors de prix. Sa banque Pravex, créée en pleine pérestroïka, a été vendue 750 millions de dollars à un groupe italien début février. Ce style controversé a valu au maire de sérieuses inimitiés, contrebalancées par un savant réseau de relations tissé sur l’ensemble de l’échiquier politique.
Mais cette fois, même le président Iouchtchenko, dont le fils serait proche du maire, a lâché Tchernovetski, devant l’insistance de Ioulia Timochenko. Celle-ci veut aller jusqu’au bout de son opération «mains propres» dans cette ex-République soviétique rongée par la corruption. Et quel meilleur exemple que le flamboyant maire de Kiev pour entamer la chasse aux sorcières ?
Mais pour Timochenko, l’enjeu est aussi électoral. A un an de la prochaine présidentielle, la Premier ministre tente de placer ses fidèles là où se sont nichés ses ennemis : à Kiev, mais aussi à Kharkiv, la deuxième ville du pays. Une enquête a ainsi été lancée par les services de sécurité ukrainiens contre le conseil municipal, accusé d’avoir détourné de l’argent public. Mais, selon certains politologues ukrainiens, Tchernovetski, fort de sa popularité auprès de ses administrés, pourrait bien, encore une fois, créer la surprise lors de la municipale du 25 mai.
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