Sur la route avec nous

Deux journalistes français en reportage : hécatombe de moutons dans la vallée d’Ak Say…

Cette note en plusieurs episodes pour patienter en attendant d'ecouter sur la Radio Suisse Romande, et peut-etre de lire, nos reportages sur la Vallee d'Ak Say.

Retour de cinq jours de reportage dans la vallée d’Ak Say, Chez_lakhat_femmes_paintà 11 heures de voiture de Bishkek, la capitale. Nous sommes accompagnés par Nourali, professeur de français à l’université nationale et enfant d’At Bashy, le plus proche village de la vallée. Oké sera, au volant d’une vieille jeep sovétique, notre chauffeur tout-terrain. Avec lui, nous franchissons le col enneigé qui nous sépare de la vallée, la plus froide et l’une des plus hautes du Kirghizistan. Bien sûr, on pousse, et passe le col à pied… Nous y attend le premier poste de contrôle, tenu par des militaires portant encore les insignes soviétiques sur leurs lourds manteaux de fourrure. « Gloire à nos valeureux soldats qui défendent les frontières sacrées du Kirghizistan », la formule est inscrite au fronton de la petite garnison. Car nous sommes ici à quelques kilomètres de la Chine, tapie de l’autre côté des dernières montagnes kirghizes. Après Ak Say, c’est le Xing-Tiang chinois. Installés ici du temps de l’Union soviétique pour contrôler le passage à ce confin de l’URSS, les soldats sont restés, défendant aujourd’hui un pays indépendant qui, ironie du sort, (sur)vit notamment grâce à l’afflux massif de produits chinois et qui a si peur d’être envahi par son géant de voisin. Munis de permis préalablement visés par le SNB, les services de renseignements kirghizes, nous passons les contrôles sans encombres.

La vallée est là, à perte de vue sur des dizaines de kilomètres. La voiture suit la ligne de poteaux électriques, qui venaient jusqu’ici alimenter les bergers travaillant pour l’Etat. Et au fond de la vallée s’étale l’ancien « centre culturel », qui comprenait à l’époque soviétique un hôpital, un magasin, un hôtel, une salle de cinéma et de concert, etc. Il fallait divertir, nourrir et soigner ces éleveurs, venus par milliers sous l’URSS travailler à Ak Sai. Véritable grenier à viande de l’Union, la vallée a nourri plusieurs millions de têtes de bétail, moutons, yaks, chevaux, répartis en 9 kolkhozes. Aujourd’hui, le centre n’abrite plus que 4 ou 5 familles, les bâtiments sont tombés en poussière, et il faut attendre la visite annuelle d’un médecin d’At Bashy pour espérer un soin.

Autour de ces rues aux allures de ville-fantôme, se côtoient deux familles d’anciens infirmiers, recyclés aujourd’hui en « chômeur-artisans», et deux éleveurs dont un tient le magasin, désormais réduit à sa portion congrue. Nous dormirons chez Aïbek, vague cousin de Nourali. Nous errons dans le village, visitant l’ancien hopital, où sont restés chaise d’accouchement, bureaux et tableaux de tours de garde. « J’ai accouché de mon dernier enfant à la maison et coupé seule le cordon », nous racontera une des anciennes infirmières. Téléphone, radio, plus rien ne marche, et At-Bashy est souvent trop loin. Pour descendre, il faut attendre qu’une voiture comme la notre passe par Ak Say…

Dans_lherbe_paint Nous nous enfonçons dans la vallée, à la recherche de la bergerie de Lakhat et de sa femme Kiris. Ils vivent entre quatre murs de terre séchée, avec leurs deux jeunes enfants et élèvent les juments d’un propriétaire vivant en bas. C’est presque toujours le cas pour les quelques 350 familles qui continuent de vivre dans la vallée. « Avant, on travaillait pour l’Etat, maintenant, nous sommes les esclaves des riches, ça ne change rien », résume un voisin. Dans la maison sont rassemblés une dizaine de couples, fêtant ce 8 mars, jour de la fête des femmes. Ici, on ne badine pas avec le calendrier. La nappe à même le sol est littéralement recouverte de borsoks, petits pains frits, qui servent à patienter avant le repas. Nous sommes époustouflés par l’accueil et Nourali, Kirghize pourtant rompu aux traditions nationales, n’en revient pas non plus. Quelques minutes après notre arrivée, on mange, on boit, on chante ensemble. Thé par litres, vodka bien sûr, mais aussi bozo, l’une des boissons nationales, à base de céréales fermentées. Les bergers sont semblent-ils touché de voir des étrangers monter en plein hiver, et si haut, à leur rencontre.

Tandis que le Beshbarmak, plat de mouton bouilli, achève sa cuisson sur le poêle chauffé à la bouse de yak séchée, Tourganali, le plus ancien de la bande, nous embarque à cheval. Nous chevauchons doucement sur la steppe, prenant le temps d’admirer le coucher de soleil sur la vallée. A cause de l’altitude, le mouton cuit ici en quatre heures, contre 2 à Bishkek. Au sommet d’un petit vallon, on observe la frontière chinoise, à 4 heures de cheval, et les bergers nous racontent leur belle époque, quand on se bousculait pour vivre à Ak Say…

Mathilde et Camille

16 mars 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (3)

Dans les coulisses de Miss Dounganskaia 2007

Img_0313 Les dounganes forment l'une des minorites les plus importantes du Kirghizistan. Certains de ces chinois musulmans ont quitte la Chine il y a 130 ans cette annee pour s'installer en Asie centrale. Depuis, ils tentent de faire survivre leur langue, leurs traditions lors de ceremonies familiales et communautaires. Fin fevrier a eu lieu l'election de Miss dounganskaia 2007: defiles de jeunes filles en costume traditionnels et modernes, epreuves de connaissance de la culture doungane, le tout entrecoupe de tours de chant et de danses... Invites par notre amie doungane Kahima, nous y etions. Cette fois-ci, c'est par le son que nous vous faisons partager ce moment.Img_0345

Téléchargement montage_miss_fini.mp3

Vous trouverez tout de meme quelques photos des miss (pas de maillots de bain, desole) dans le carnet en images #2

Mathilde et Camille

12 mars 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

Concert privé, Nourizat au Komouz

Img_0197 Le Komous (à ne pas confondre avec Koumis, le désormais célèbre lait de jument fermenté local) est un instrument assez rudimentaire, formé d’une caisse de résonnance en forme de longue poire et de trois cordes. Nourizat, 20 ans, est une vraie professionnelle et possède un komous en bois d’abricotier, pour un son plus chaud.

La jeune fille étudie au conservatoire de Bishkek, département traditionnel, et vit dans un foyer de musiciens. Discrète, timide, Nourizat joue pour nous, les yeux parfois fermés, le corps tendu, faisant valser son instrument devant elle, claquant des doigts ou frappant l’instrument du dos de sa main… une dextérité folle qui nous fait presque regretter la vidéo. Vous vous contenterez, nous l’espérons, de la mélodie et du bruit caractéristique des cordes…

Aujourd’hui, même si les jeunes sont majoritairement tournés vers la musique occidentale, le komous revient dans les mœurs. Mais c’est un survivant : l’Union soviétique a peu à peu fait tomber dans l’oubli la musique traditionnelle kirghize et ses instruments, au profit des classiques russes, au violon ou au piano. Mais comme partout en Asie centrale, l’URSS a aussi su jouer du folklore local en incitant à composer au komous des chansons aux thèmes typiquement soviétiques, comme cette « Journée de travail »… Téléchargement jour_de_travail.mp3. L’ouvrier kirghize y est appelé au labeur et au courage.

Ou encore cette mère qui pleure son fils, parti à la « grande guerre patriotique ». C’est ainsi que Russes et Kirghizes nomment la deuxième guerre mondiale.Téléchargement chanson_triste.mp3

Et malgré la colonisation, le caractère nomade du peuple kirghize reste un élément majeur des chansons au Komous et on ne compte plus les airs rappelant les courses à cheval ou la beauté de la bête en plein effort… Un « Alasgulu », pour une dernière chevauchée en musique… Téléchargement course_cheval_alasgulu.mp3

Mathilde et Camille

27 février 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Alamédine, bazar de Bishkek

Mes_lagmansGraphique  Balade en noir et blanc dans le bazar d'Alamédine, l'un des plus beaux marchés couverts de Bishkek. Là où l'on ne voit souvent que les étals, marchandises et couleurs, nous sommes impressionnés par les structures architecturales des marchés soviétiques. A Alamédine, la grande halle est percée de hauts puits de lumières fuselés. Et les voûtes, coursives du bâtiment offrent un cadre rêvé aux photographes amateurs.

Voir dans l'album "carnet en images #2".

19 février 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

A l'école du Coran

Un peu lassée de notre vision occidentale souvent caricaturale de l’Islam et vivant depuis 4 mois dans un pays musulman, je me suis mise en tête de visiter la grande médressa (école coranique) de Bichkek, après avoir visité trop vite celle de Kokand, en Ouzbékistan, pour le compte du Journal des Enfants (article à paraître dans en février, nous relayerons sur le site). Lecture_coran_plus_loin

L’islam kirghize est traditionnellement modéré. Il a d’abord dû composer avec le mode de vie nomade et les pratiques chamaniques. Plus de 60 ans d’athéisme officiel prôné par l’URSS l’ont ensuite sérieusement affaibli. Avec l’indépendance, l’islam s’est redéployé : plus de 8000 mosquées ont été construites et partout dans le pays ont fleuri des écoles musulmanes.

La plus importante médressa de Bichkek jouxte la mosquée centrale de la capitale, où les hommes (seulement) participent aux prières communes. Oulan, jeune homme de 17 ans, sera mon guide. Il a lui-même fréquenté une médressa et en a gardé une foi profonde, qu’il exalte presque à chaque phrase. Une cinquantaine d'élèves, âgés de 7 à 17 ans fréquente la médressa. Ils vivent nuit et jour dans l’école. Le week-end, retour en famille…

Je pénètre dans l’une des chambres, des dizaines de petites paires de chaussures s’entassent sur le pas de porte. Les élèves vivent à quinze dans ces grandes pièces, à la fois dortoir et salle de cours. Un simple lavabo forme le coin toilette et une grande marmite sur un foyer fait office de cuisine. « Pas de femme ici, nous nous débrouillons tous seuls ! », affirme l’un des professeurs, rieur. Son collègue, un honorable turban noué autour de sa tête dodelinante, est assis en tailleur sur l’un des lits superposés : il lit le Coran. Les élèves l’écoutent en palsmodiant. Ils feront toute la scolarité ici, sans suivre d’autre cours que l’apprentissage de la prière, de 8 h du matin à 6 h du soir.

Enfants_proches« Dans les médressas, les élèves apprennent uniquement à lire le Livre sacré. Pour le comprendre, nous avons des textes en kirghize. Puis, si ils le veulent, les élèves peuvent aller à l’université arabique voisine pour apprendre l’arabe ». Ainsi m’explique Yigit, spécialiste du coran et professeur lui aussi, dans la salle de prière de la mosquée. Mes jambes, en tailleur depuis une heure, commencent à sérieusement me faire souffrir. Mais j’essaye de garder l’attitude la plus respectueuse possible, consciente de la faveur qui m’est faite. Je suis l’unique femme présente dans ce lieu saint, avec comme seule présence masculine un adolescent grand comme trois pommes. Je m’interroge… Pourquoi couper ainsi les élèves de l’extérieur, et ignorer les sciences, l’histoire, les langues ?  « Ils doivent vivre ici, me répond avec douceur Yigit, pour étudier, comprendre le livre et apprendre à se contrôler. Dehors, vous ne pouvez pas vous concentrer sur le Coran. En sortant, ils sauront vivre avec les autres et se comporter dans le monde ». Oulan rajoute, fermement convaincu, que « tout est dit dans le Coran ». D’ailleurs, tous deux se réfèrent constamment au prophète Mahomet pour répondre à chacune de mes questions. Gros_plan

Le futur pour les cinquante pensionnaires est, pour la majorité d'entre eux, d’embrasser la « profession » d’imam, ce qui exige d’aller étudier un temps à l’étranger. Les autres seront professeurs ou simples croyants. Les filles, qui étudient dans une médressa séparée, « se marieront et pourront elles aussi devenir professeurs, mais jamais imam », me précise Yigit. 

Je ressors de la médressa, pleine des paroles du Prophète, qui ont toujours du mal à raisonner en moi.« Tu dois être à l'intérieur de l'islam pour le comprendre, m'explique Oulan. Mais c'est déjà bien d'essayer de t'en approcher. Tu peux poser toutes tes questions, l'islam est une religion de paix ». 

Mathilde

07 février 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (2)

Ouzbekistan, derniere...

Nous en etions restes a Marghilan, capitale de la soie ouzbeke...
C'est de la que le dernier bus collectif de ce voyage nous a conduit vers "notre" Kirghizistan, via Andijan.
De cette derniere, associee a la repression sanglante d'une manifestation d'opposition en mai 2005, nous ne verrons pas grand-chose: une demi-heure de balade et une impression de malaise a chaque fois que nous faisions mine de faire des photos... Enfin, la route vers la frontiere, et les marshroutkas a 5 som qui nous attendent de l'autre cote.

Trois mois que nous vivons au Kirghizistan, deux semaines d'infidelite ouzbeke, et nous voila a marcher en terre kirghize comme si l'on revenait d'un long periple loin de chez nous! On mettra ce patriotisme passager sur le compte du soulagement ressenti en quittant le territoire ouzbek: quel plaisir de circuler sur les routes sans etre arrete toutes les vingt minutes a un controle routier, de voir l'agitation d'Och, jumelle kirghize des villes de la vallee du Ferghana. Tout ici est plus vivant, leger, apaise... plus liberalise aussi, c'est une autre facon de le dire. Mais egalement plus delabre ...
Ce voyage est-il pour autant termine ? Pas si sur : l'Ouzbekistan nous poursuit dans nos travaux, et nous commencons tout juste a exploiter le riche materiau collecte au cours de ces vingt jours. A voir deja dans Ouest-France le 31 janvier, et sur le site professionnel de www.reporters-asiecentrale.net, bien sur.

C'est la route Och-Bichkek qui nous a ramene chez nous. Dix heures de voyage a travers les montagnes enneigees, sur une route magnifique. Des lacs, des cols, des sommets a portee de la main, des vallees immenses et des steppes ouvertes a plus de 3000 metres... Vivement l'ete!

Camille et Mathilde

31 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Marghilan, route de la soie ?

Arrivée dans une nouvelle ville, première étape incontournable, trouver un endroit où poser nos sacs et, accessoirement, où dormir. Les guides ne font mention que de l’hôtel soviétique de la ville, qui jouxte la gare routière.

L’hôtel est ouvert, mais n’a ni le gaz, ni l’électricité… et n’accueille donc pas de visiteurs ! Nous nous retrouvons donc sans lieu où loger, les autres hôtels du secteur étant soit en périphérie de la ville, soit carrément dans la ville voisine de Ferghana, à 25 minutes de bus plus au sud.

Et puis très simplement, comme toujours dans ces cas-là, un homme nous accoste devant l’hôtel, au moment où l’on commençait à se demander ce que nous allions faire, et nous fait comprendre qu’il peut nous trouver un hébergement, non enregistré par les autorités. Les deux hommes avec qui nous avons lié connaissance dans le bus (les traditionnelles discussions, « comment tu t’appelles, tu es marié, tu as des enfants, combien tu gagnes… »), et qui nous escortent depuis l’arrivée, semblent trouver la solution valable. On prend donc congé d’eux et l’on suit le providentiel hébergeur.

Quelques rues et un combat de coqs plus loin, nous découvrons notre résidence des deux prochaines nuits : une maison ouzbèke typique, avec sa cour carrée entourée de larges murs, son préau, son four à pain, et deux pièces d’habitation. La première est celle où vivent nos hôtes, deux femmes apparemment seules, la deuxième est celle qui nous est allouée. A l’intérieur, la simplicité ouzbèke à laquelle nous avons pris goût : une table basse, un petit poêle où s’agite une fine flamme de gaz. Et surtout, au fond de la pièce rectangulaire au sol nu, une haute pile de töshoks, les fins matelas aux motifs de velours hauts en couleurs que l’on déplie chaque soir pour en faire sa couche. Rudimentaire au premier abord, mais d’un confort inégalable, au point que nous les préférions depuis Khiva aux sommiers crevés des guesthouses.  

La ville de Marghilan est tout entière tournée vers son imposant bazar, et s’étend sur le bord de la route qui traverse le sud de la vallée, l’héritière de la légendaire « Route de la soie » que nous suivons sans bien nous en rendre compte depuis Khiva. Tant vantée par la prose touristique sur la région, la fameuse route ne semble pas avoir de réelle consistance dans l’esprit des gens d’ici. L’idée de patrimoine ne fait pas le poids dans un coin du Monde où l’on a fait « table rase » du passé. Autant dire que le grand souffle de l’Histoire ne souffle plus depuis longtemps sur la tristounette Marghilan,  ville passage, qui tire pourtant bien sa célébrité de sa soie ! Car de tous temps, Marghilan a été l’un des épicentres de la route de la soie, et l’on y tisse aujourd’hui encore des kilomètres d’étoffes bariolées aux motifs chevronnés traditionnels que l’on voit encore très présents dans la garde-robe des femmes .

Marguilan_peigne

Nous passons la matinée à visiter la fabrique de Yod-Gorlik, réputée pour être la plus traditionnelle de la ville. Du cocon au gallon de tissu, on découvre le travail des ouvrières de la fabrique, celles qui dérobent aux cocons bouillis leur précieux fil, toute la journée les mains dans l’eau chaude, mais aussi les tisseuses. Chacune devant son métier en bois peint de couleurs vives, elles répètent en rythme les gestes mécaniques qui donnent vie à la bistanclaque, cette musique caractéristique de la navette qui file entre les fils tendus, qui bute en bout de ligne, claque et repart à toute vitesse dans l’autre sens… Un plaisir pour les oreilles autant que pour les yeux du visiteur, une gymnastique savamment maîtrisée par les ouvrières…

Youssouf, notre guide, parle anglais sans problème. Normal, nous dit-il, il revient de New-York où il a organisé une exposition-vente des produits de la fabrique. Yod-Gorlik et sa soie sont réputées dans le monde entier, insiste Youssouf comme pour nous convaincre au moment de passer à la boutique…

Passage ensuite par la mosquée de la ville, à l’heure de la prière. L’affluence des croyants nous confirme que la vallée du Ferghana est une région où l’Islam tient une place essentielle. Autour du bâtiment, le bazar s’étend, bruyant et animé. Le commerce aussi occupe une grande place dans la vie des ouzbeks, ici sans doute plus qu’ailleurs…

Marguilan_pause_tissage

Nous quitterons à regret notre petite chambre, froide et simple certes, mais qui nous aura permis pour quelques temps de voir de plus près la vie à l’intérieur de ces maisons ouzbèkes, ces cours que l’on devine dans l’entrebâillement des portails mais où il est si dur, pour des étrangers, de pénétrer.

28 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

Cafards, imprimerie et école coranique

Kokand_cimetiere_mususlman Arrivée à Kokand. Ancienne capitale de Khanat, centre politique et religieux de la région concurrent de Boukhara. En tous cas, avant que les troupes soviétiques n’y matent une révolte dans les premières années de l’URSS, et rasent quasiment tout ce qui rappelait cette puissance passée. La ville a tout de même gardé un centre-ville pimpant et quelques édifices religieux émouvants car éloignés de l’activité touristique. Ici, on ne badine pas avec l’Islam. Djamilia, notre compagne de voyage dans le taxi depuis Tashkent, nous avait prévenu, en préambule à toute conversation : « Je suis musulmane ». Et toute la ville l’est. Dépités par la nuit tombée trop tôt, et la brume qui enveloppe cette ville inconnue, nous comptions nous réfugier dans un café et y boire une bière en attendant l’heure du diner… Peine perdue, il semble impossible de boire de l’alcool dans les lieux publics, et les cafés n’accueillent bien souvent que des hommes. Les russes ont déserté Qoqand, comme nous l’apprend la réceptionniste du seul hôtel de la ville, où nous descendons faute d’alternative. Et pourtant, la description du guide Lonely Planet avait de quoi nous en dissuader : « chambres d’une saleté repoussante, littéralement infestées de cafards ». Charmant, sauf que largement exagéré. Pour trouver des conditions acceptables, il nous aura tout de même fallu opter pour la « suite luxe », une poignée de dollars pour deux tristes pièces à peine meublées et une salle de bains pas franchement convaincante. Le tout pas reluisant mais acceptable.

On s’endort toutes oreilles dressées, guettant dès la lumière éteinte le craquement des petites bêtes sur le plancher. Erreur, le grondement qui nous réveille en sursaut quelques minutes plus tard n’est pas du à l’attaque des insectes, mais à un tremblement de terre. Et pas n’importe que tremblement de terre : puissance 8 à son épicentre, situé à quelques 40 km au sud, de l’autre côté de la frontière kirghize ! Sur le coup, on comprend vite de quoi il s’agit, puis l’angoisse arrive : pour le moment, toute la chambre vibre et rien ne se passe, mais jusqu’à quand ? Puis plus rien, et le sourire narquois de l’agent de sécurité qui nous rassure dans le couloir où l’on était sorti en vitesse, et en pyjama…

Dans la ville, nous tombons par hasard sur les locaux du journal de la ville. A l’intérieur, guidés parKokand_imprimerie les journalistes très enthousiastes, nous découvrons une véritable imprimerie à la Gutenberg, avec lettres de plomb et ouvrières chargées de monter les pages, lettre a près lettre, et à l’envers s’il vous plaît. Heureusement, nous comprenons que le journal n’est plus édité selon cette technique, réservée désormais à l’impression de tracts publicitaires. On aura tout de même droit à la visite des petites rotatives(matériel soviétique of course) dont sort chaque jour le journal. A 10 heures du matin, le journal du lendemain est déjà sous presse, un aperçu intéressant de la notion d’actualité dan les médias ouzbeks ! Enfin, nous visitons longuement la médressa, l’école coranique de Qoqand, la seule toujours en activité d’une ville qui en comptait plusieurs centaines du temps de sa grandeur. Ici, des jeunes hommes étudient entre 13 et 18 ans et deviendront des imams après cinq autres années à l’université de Tashkent. Nous tombons pendant les vacances, l’ambiance est donc détendue dans les petites cellules où logent les élèves par quatre. Sous couvert de tourisme, on nous y accueille volontiers, et nous tentons de saisir, sans traducteur, la vie de la médressa… A lire prochainement dans le Journal des enfants et sur le blog pour les non-abonnés !

24 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

Tachkent : La dictature en lettres capitales

Marguilan_propagande Triste capitale. Sous le soleil, nous apprécions mieux la ville que lors de notre arrivée pluvieuse. Il n'empêche : notre malaise persiste, en longeant ces avenues immenses et presque désertes. Rapide coup d'oeil à l'Hôtel de ville, flamboyant édifice. Le quartier présidentiel est lui aussi démesuré. A côté, la déjà très  monumentale Maison blanche de Bishkek fait presque office de maison de poupée. Ces bâtiments font écho à la propagande permanente qui inonde le pays. Combien de tribunaux, d'écoles, d'hôpitaux au fronton ceint d'une maxime du président Islam Karimov? Combien d'affiches et de fresques mettant en scène l'écolier, le paysan, l'instituteur, proclamant le bon-vivre de la nation ouzbèke ? Grossière propagande, inévitable attribut de cette dictature à peine masquée. Notre malaise sera confirmé quelques temps plus tard par un politologue de l’Université Américaine d’Asie centrale à Bishkek : « En Ouzbékistan on ne voit pas de statue dorée d’Islam Karimov comme au Turkménistan, mais ne soyez pas dupe : derrière la facade démocratique, il y a une très forte pression idéologique qui est exercée sur la population pour présenter le président comme le créateur et le sauveur de l’Ouzbékistan. » Ajoutez à cela ce témoignage d’un opposant rencontré en catimini à Tashkent, qui compare son pays à un « gigantesque camp de concentration », et tient le décompte des quelques 7000 prisonniers politiques détenus dans tout le pays.

Passage par le métro, impossible à photographier car bâti par les soviétiques pour pouvoir servir au besoin d’abri nucléaire. Première barrière, contrôle de la police et fouille légère de nos bagages… Nous quitterons donc Tachkent rapidement, impatients de découvrir la vallée du Ferghana. "

La riche vallée du Ferghana a cette particularité d’être à cheval sur trois pays : l’Ouzbékistan, le Kirghizistan et le Tadjikistan. Un savant découpage voulu par Staline, qui a transformé la vallée en un puzzle explosif et incohérent. Trafics en tous genres, tensions permanentes et populations en proie à des politiques de visas ubuesques. En mai 2005, une manifestation spontanée contre le pouvoir ouzbek s’est soldée par 700 morts à Andijan, la ville principale. Depuis, la surveillance s’est accrue dans cette région très riche et isolée du reste du pays.

Du voyage en taxi qui nous emmène à Kokand, première ville étape, nous gardons en mémoire ces sinistres villes industrielles, comme Angren. Cheminées d’usines, cuves immenses, ciel bas et gris malgré le soleil… et rangées interminables d’immeubles soviétiques. Certains, par un sursaut de coquetterie mâtinée de propagande, sont peinturlurés de motifs à la gloire du coton. Ils rappellent la fonction première de la vallée, la culture de « l’or blanc », qui a définitivement défiguré la mer d’Aral en aval.

Mathilde et Camille

23 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Samarcande, Timur-city

Samarcande_registan_losange Nous voici a Samarcande, la plus fantasmee des villes d'Asie centrale, la plus decevante aussi, du moins au premier abord. Le Registan, grande place centrale, ou deux medressas se font face et cotoient la mosquee d'or, nous devoilera ses charmes lentement, et grace aux diverses lumieres du jour. Nous logeons chez Bahodir, ou les routards du monde entier sont deja passes, donnant a l'endroit un air de boheme certain. Nous nous glissons le soir de notre arrivee au sein des immenses edifices, en passant comme des voleurs par dessus l'une des barrieres... Un policier surgit, nous nous raidissons, coupables tout a coup. Charmant, il nous revele ses trois mots de francais et nous invitent a revenir demain, a l'aube, pour monter en haut du minaret en sa compagnie, moyennant finances. L'ouverture reelle du batiment n'est qu'a neuf heures, ce qui laisse aux gardiens quelques heures pour faire du commerce... Nous nous eclipsons en vitesse. Samarcande_mosquee_dor Nous declinerons son offre, visitant plutot le mausole de Timur, ou Tamerlan, redoutable chef de guerre et incroyable conquerant centre-asiatique et qui a fait de Samarcande sa capitale. L'or envahit la mosaique et de nombreux musulans viennent encore s'y recueillir. Nous quitterons Samarcande par son marche, superbe et au pied de la mosquee de Bibi-Khanoun, princesse chinoise et femme preferee de Tamerlan, selon les historiens. Nous y retrouvons un peu de vie, qui fait tant defaut a l'Ouzbekistan. Nous longeons en marchant le cimetiere de la ville, bati sur les restes de la ville antique. Agreable promenade a pied, nous qui nous faisons trimbaler depuis quelques jours en bus, taxi, train...

Samarcande_petite_marchande_orange Dans le bus, les voyageurs sont toujours aussi curieux des etrangers et le passeport de Camille circule de main en main. La jeune femme qui livre Camille a un veritable interrogatoire vit seule ici avec son fils, son mari etant parti travailler en Russie. Le bus se remplit de voyageurs, tous ou presque sont charges des delicieux nan achetes en ville. Alim, refugie ouzbek vivant en France, nous avait prevenu. En Ouzbekistan, le pain est sacre. Alors le pain de Samarcande ...

Mathilde et Camille

20 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

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