Sur la route avec nous

Les journaleux en vacances... de l'ecole 26

L'ecole 26 ferme ses portes... ou presque. Notre classe est requisitionnee pour reparer l'ecole durant tout le mois de juin. Apres les cahiers et les crayons, clous, pinceaux et marteaux.


Pour feter ensemble la fin de l'annee scolaire, nous sommes partis en goguette au pied des montagnes d'Alamedin, dans la datcha d'une eleve. Serie de trombines de nos eleves, jeunes filles de 15 ou 16 ans, russes pour la plupart, ce qui ne fait pas de notre ecole la plus representative du pays.

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Seul couac, les examens. En theorie, si un eleve echoue dans plus de 2 matieres, il doit redoubler. En realite, l'eleve, surtout si c'est une fille, ne redouble JAMAIS. Il doit trouver une ecole de niveau moindre, qui accepte de le faire passer en classe superieure. Les eleves en difficultes trainent donc leurs lacune d'annee en annee, et ce jusqu'a l'universite. La, les arrangements sont nombreux pour arriver au diplome (passage, rattrapage, re-re-rattrapage, corruption, financiere ou materielle), ce qui nous donne au final des tas de professionnels mal formes.

Bref, introduisez donc des corps etrangers dans un tel systeme, et c'est la zizanie assuree.


Mathilde et Camille

04 juin 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

Au coeur des prisons kirghizes... Episode 2

Le reportage radio qui nous a donne l'occasion de cette note sera diffuse prochainement, dans le cadre de l'emission Priorite Sante, sur RFI...

Nous passerons une heure dans le SIZO, à peine le temps de sentir l’ambiance. Je demande la permission d’entrer dans une cellule pour prendre une photo, les 7 prisonniers présents me tournent le dos mais se laissent photographier (1). Puis nous repartons dans la cavalcade des couloirs, toujours sous escorte. Nous ne verrons en détail que la partie de la prison en cours de rénovation, financée par MSF. En plus du bruit de la prison, nous sommes donc au cœur d’un vrai chantier.

Colonie 31, colonie tuberculose. Après la détection au SIZO, les prisonniers malades (et condamnés) passent dans cette enceinte située à une trentaine de kilomètres au nord de Bishkek. Y arrivent également des détenus de tous le Kirghizistan, transférés ici sur ordre médical.

Après l’habituel contrôle de nos passeports, nous entrons dans ce qui ressemble à un Traitementweb_2
petit village-vacances désenchanté. Pelouses, arbres fruitiers, à votre droite, l’hôpital, à votre gauche les bâtiments administratifs. Nous y entrons pour plaider notre cause, passage obligé auprès des autorités du lieux. L’autorisation du ministre de la justice ne suffit pas, il faut renégocier dans chaque structure avec le chef local. « Les journalistes, on les connaît ! », déclare ce dernier… Nous sommes assis en rang, au bord de l’habituelle table en T, qui place notre interlocuteur seul face au mur. De l’autre côté de la table, une rangée de gardiens. Finalement, nous ferons le tour des lieux avec un seul d’entre eux, pas franchement réjouit à l’idée de se coltiner des visiteurs.

Nous entrons dans l’enceinte de la prison proprement dite, y croisons les prisonniers, vêtus d’un costume de gros drap gris anthracite. Ils sont libres d’aller et venir, fument des cigarettes avec des gardiens que rien ne différencie des autres si ce n’est l’habit militaire et la corpulence. La colonie fonctionne presque en autogestion. Ce sont les prisonniers eux-mêmes qui en assurent l’ordre, selon un système de castes sur lequel s’appuie une administration défaillante, tant sur le plan du personnel que des finances. Quatre castes cohabitent, les deux dernières étant définies comme « intouchables » par les deux premières. Zéro contact entre ces deux mondes, sous peine de tomber soi même sous le coup de la discrimination.

Ces « intouchables » vivent dans une partie de la prison que nous ne verrons pas, située derrière un grand mur, sur les ruines de l’ancienne zone industrielle de la prison. Parmi eux se trouvent les « collaborateurs », ceux qui travaillent avec l’administration. Les baraques y ont été construites par les prisonniers eux-mêmes, qui ont trouvé dans les gravas les matières premières nécessaires. « Impossible de tout comprendre et ce n’est pas notre rôle », confie l’un des salariés de MSF, en but avec un système qui complique tout le processus médical. L’équipe, dans le traitement de la tuberculose, a donc aménagé des horaires spéciaux pour les plus bas dans l’échelle carcérale, pour éviter tout contact. Faire avec, mais ne se mêler des problèmes de l’organisation carcérale : tel est le contrat tacite qui lie les deux parties et permet aux ONG de travailler.

Gagarineweb
Outre la ségrégation interne, la prison est aussi le lieu des petits et des grands arrangements. Tout y circule : paniers-repas, médicaments, drogues en tous genres… Les abords de l’hôpital de la colonie 31 sont d’ailleurs jonchés de seringues utilisées par les détenus toxicomanes. Enfin, la lutte contre la tuberculose passe par une amélioration minimale des conditions de vie (cellules moins surpeuplées, nourriture et hygiène améliorées…), un confort tout relatif qui donne lieu à un autre trafic : celui des crachats, premier moyen de détection de la maladie. Certains prisonniers non contaminés n’hésitent pas à monnayer le crachat d’un malade pour être admis dans une colonie hôpital, prenant ainsi le risque d’être réellement infecté. « Le risque de la TB n’est pas la première chose à laquelle les détenus pensent. Ils pensent à leur survie avant tout », estime l’un des représentants de MSF. Et pourtant la tuberculose, au Kirghizistan, tue encore.

Nous en avons l’explication lors de notre passage, le dernier, dans la colonie 27, voisine de la 31. Ici
travaillent les équipes du Comité international de la Croix Rouge (CICR), dans les mêmes conditions que MSF à la colonie 31. Sauf qu’à la colonie 27, on prend en charge plus particulièrement les malades atteints des formes multi-résistantes de la TB. Ici doit ouvrir dans quelques mois un département spécial destiné à la prise en charge de ces cas, que les médicaments classiques, les seuls actuellement disponibles en prison, ne peuvent soigner. Pour l’heure, ces malades sont traités avec le traitement de base, appelé DOTS, et rares sont ceux qui arrivent à vaincre ainsi la maladie. Les autres, malgré les médicaments, voient leur cas s’aggraver lentement… Et, comme nous le confirme sans illusion un détenu, d’une maigreur qui laisse peu d’équivoque sur son état de santé, plusieurs d’entre eux meurent ici chaque semaine.

C’est donc avec fierté que l’on nous fait faire le tour du chantier de ce qui sera bientôt, grâce aux dons Temoignagewebinternationaux (et en particulier l’argent provenant de la « taxe Chirac » sur les billets d’avion), le service DOTS +, du nom du protocole de traitement. Un peu plus loin, autre chantier, beaucoup moins réjouissant : on pose les premières pierres d’un futur service de soins palliatifs. Il accueillera à terme encore un autre type de patients, ceux qui sont porteurs de la forme extrêmement résistante de la maladie. Pour ceux-là, même le protocole DOTS + ne pourra rien et seule une amélioration de leur fin de vie peut leur être proposée.

La tuberculose XDR, comme on l’appelle, inquiète véritablement la communauté médicale internationale, parce qu’elle la met face à sa responsabilité : croyant avoir éradiqué la TB chez les occidentaux, on a cessé les recherches de traitement et laissé l’épidémie reprendre sous des formes nouvelles en ex-URSS. Aujourd’hui, on se retrouve sans moyens pour la combattre, et alors que les déplacements migratoires entre Est et Ouest se multiplient, la TB fait un retour progressif en Europe. Triste prophétie du chef de mission de MSF au Kirghizistan : « Il y a deux grandes épidémies dans le monde : le SIDA, plutôt concentré en Afrique, et la TB, en ex-URSS. Pour l’heure les deux sont isolées, mais si elles venaient à se rencontrer, le résultat serait catastrophique. »

Camille et Mathilde

(1) Ces photos prises dans le SIZO, vous ne pourrez pas les voir. Elles etaient toujours sur l'appareil quand celui-ci nous a ete vole, il y a un mois de cela... Deux grosses pertes, donc.


30 mai 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Au coeur des prisons kirghizes... Episode 1

Le reportage radio qui nous a donne l'occasion de cette note sera diffuse prochainement, dans le cadre de l'emission Priorite Sante, sur RFI...


Apres de longues semaines a errer dans les meandres adminstratifs kirghizes, nous avons enfin obtenu, debut mai, le fameux document nous permettant de d'entamer notre reportage dans les prisons kirghizes.
Nous y sommes donc entres par l'entremise de Medecins Sans Frontieres (branche suisse) et de la Croix Rouge internationale (CICR), qui tous deux oeuvrent pour la lutte contre la tuberculose au sein du systeme penitentiaire.

Comme dans toute l'ex-URSS, la tuberculose reste au Kirghizistan l'epidemie numero 1, devancant le Sida. Dans_la_chambre_paintIl y a 15 fois plus de nouveaux cas ici chaque annee ici qu'en Europe, dans la societe civile. En prison, ce chiffre est multiplie par 40. Comme nous l'ont explique les chefs des deux missions CICR et MSF, les pays d'ex-sovietiques et plus particulierement leurs prisons constituent le foyer principal d'une epidemie doublement redoutable : la tuberculose, maladie sociale par excellence, avait ete promue grand combat du regime sovietique. Un effort sanitaire et financier que n'ont pas pu prolonger les nouvelles republiques issues de l'URSS, comme le Kirghizistan. Les traitements se sont poursuivis, avec les (faibles) moyens du bord, ce qui a favorise l'apparition d'une tuberculose resistante aux medicaments.
Enfin, la tuberculose, qui croit dans des environnements marques par la misere sociale et une hygiene deficiente, ne pouvait qu'exploser dans les prisons kirghizes. Nous sommes donc alles voir a l'interieur de cet univers tres particulier, regit par des lois internes complexes, ce qui complique largement la tache des equipes medicales etrangeres et locales.


Le systeme penitentiaire kirghize se divise entre colonies et SIZO. Le SIZO s'apparente a nos centres de retention, ou maisons d'arret. Les prisonniers y attendent, parfois tres longtemps, leur jugement. Ils sont la en moyenne entre 6 mois et 1 ans, dans des conditions particulierement propices a la contamination. Nous sommes entres, sous protection, dans le SIZO 1, a Bischkek. Nous arrivons ici dans une periode troublee: des reglements de comptes internes ont coute la vie a deux hommes la semaine precedente, et les tensions politiques de l'exterieur se repercutent aussi dans les murs de la prison, tant les liens sont etroits entre mafias criminelles et milieux politiques... Mirador_paint
Dans l'antichambre du SIZO, nous croisons tour a tour les deux personnages cles du lieu: tout d'abord le chef des prisonniers, sorte de "big baby" bien nourri et portant fierement un survetement de marque, escorte de son garde du corps personnel. Il nous precede dans le bureau de l'autre chef, l'officiel cette fois, tout aussi corpulent, qui signe en bougonnant notre autorisation de visite. Premier apercu de la prison a la kirghize, ou l'administration ne peut rien sans le soutien de l'autre hierarchie, celle, mafieuse, des prisonniers.

Enfilades de couloirs, boyaux sombres et humides, portes blindees... Sur notre passage, les lourds oeilletons se referment un a un, tires de l'interieur par les prisonniers. Notre progression dans le couloir est donc rythmee par les bruits caracteristiques de la prison, claquements metalliques, trousseaux de cles, mais aussi par les sonores talons de la traductrice. Les odeurs aussi nous accompagnent, alors que deux prisonniers nous depassent, portant a bout de bras une enorme gamelle de cantine, au fumet epouvantable.


Presses par des gardes visiblement tendus, nous ne nous attardons pas dans le couloir des condamnes a mort, qui sont, depuis le recent moratoire sur la peine de mort, desormais detenus ici a vie, et nous debouchons enfin sur le "couloir de la TB". Ici sont isoles depuis peu les prisonniers porteurs de la TB et potentiellement contagieux.


Les cellules, en passe d'etre renovees, sont presques pimpantes, avec leurs 16 lits superposes et un coin WC protege des regards par un rideau, le tout dans 25 metres carres. Les autres prisonniers s'entassent parfois jusqu'a 25 dans des pieces autrement plus insalubres. Un peu plus loin dans le couloir se trouve la salle ou les infirmieres donnent, chaque jour, le traitement aux detenus: un cocktail de medicaments a prendre sous controle strict. Un travail stressant, risque, qui seduit bien peu les infirmieres kirghizes. Celle que nous rencontrons le jour de notre visite est la depuis a peine deux mois et ne cache pas son envie d'aller voir ailleurs au plus vite. Le responsable de MSF qui nous accompagne confirme que les equipes changent tres souvent, ce qui complique le travail de suivi. Il nous assure aussi que meme dans les periodes de fortes tensions a l'interieur des prisons, la securite des equipes medicales est garantie par un code d'honneur propre aux prisonniers.


Camille et Mathilde

(La suite mercredi, en attendant, des photos dans le carnet en images)

28 mai 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Ils sont passes par chez nous...

Montageweb
Arno, Isabelle et Damien traversent le continent Eurasiatique, a velo ! De passage sur Bishkek, ils ont pose leurs sacoches chez nous. De quoi nous faire passer pour des sedentaires encroutes, et nous redonner des envies de voyages. Un an, deja, de pedalage sur les routes d'Europe, de Russie, d'Asie centrale, et ils vous diront que le velo, ils n'aiment pas ca! Le rythme de leur periple est en tous cas celui des vrais beaux voyages, de la decouverte avant tout. Les voila repartis vers Osh, puis la Chine, le Tibet, le Nepal et l'Inde. Pour suivre leurs aventures velocypedes, visitez leur site .

07 mai 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (7)

Un petit tour sur la FM kirghize

Pour les melomanes et radiophiles qui nous Bande_fm
demandent ce qu'on ecoute sur la FM par ici: voici la reponse en son, de la pop russe, du traditionnel kirghize, des debats politiques ou des varietes ouzbekes... et meme un chouia de R'n'B francais !

Téléchargement tour_de_bande_fm.mp3

Camille et Mathilde

29 avril 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

Place nette

Les manifestations ont pris fin la semaine derniere a Bichkek, apres une nuit plutot agitee, qui a vu s'affronter manifestants et forces de l'ordre (voir le papier de Camille pour RFI). Dans la nuit, les autorites ont fait enlever yourtes, tentes, estrade, et au petit matin, la place Ala Too avait retrouve son apparence ordinaire.

Les "oppositionnaires" ont interrompu leur mouvement, et accusent desormais le pouvoir d'avoir provoque les affrontements. Les leaders sont actuellement entendus dans le cadre d'une enquete sur les evenements de jeudi dernier. Le Front Uni, a l'origine des constestations, se dechire a nouveau, et personne ne veut prendre la responsabilite de l'escalade.

La politique kirghize est un casse-tete, que nous ne sommes pas prets de demeler...

23 avril 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Nooruz à Toktogul

Que célèbre-t-on traditionnellement le 21 mars ? Le printemps ? Babouchkatoktogul Eh bien non, c’est Nooruz, fête aux Jeudelabouteille_2  origines et à la signification peu sûres, mais qui est célébrée dans toute l’Asie centrale, ainsi qu’en Iran. Nooruz, étymologiquement parlant, renvoie au nouvel an perse, le 21 mars. Mais on y retrouve également, pour beaucoup, le phénomène astral, l’équinoxe, et l’idée de renaissance, de renouveau lié au retour des beaux jours. Mais ne nous y méprenons, pas, pour tout kirghize, le printemps commence le 1er mars, et non le 21 !

Et a-t-on finalement besoin de raisons valables pour s’amuser ? Au Kirghizistan, on nous avait prévenu, c’est dans les villages, loin de la capitale, que l’on profite le mieux des réjouissances de Nooruz. C’est donc à Toktogul, a mi-chemin entre Bishkek et Osh, coincé entre deux chaînes de montagnes, que nous avons passé cette journée, invités par la famille de notre ami (et interprète) Kalinour.

Début des réjouissances en fin de matinée : c’est sur la large esplanade centrale de la petite ville que ça se passe : discours des officiels locaux, et surtout succession sur scène de nombreux groupes d’artistes traditionnels kirghizes. On aura droit au cours de plus de deux heures de spectacle en plein-air à des chansons traditionnelles, ensembles de komouz et de guimbardes, danses et, clou de la représentation, des enfants de l’école locale reprenant deux des disciplines les plus nobles au Kirghizistan. D’abord un affrontement de deux joueurs de komouz, improvisant une joute oratoire, s’envoyant des vannes en musique. Ensuite, deux jeunes manaschis passionnent la foule en lui contant, à grands gestes et éclats de voix, l’épopée de Manas, à la manière des traditionnels conteurs kirghizes. Manas, c’est le héros national, grand guerrier des temps anciens, dont les aventures font l’objet de l’œuvre orale la plus vieille et la plus dense (20 fois l’Iliade et l’Odysée, nous assurent fièrement les kirghizes), transmise depuis plus de 1000 ans par les conteurs voyageurs, les fameux manaschis, capables de conter pendant des journées entières dans un état de transe narrative…

Dansebabouchka Mais le gros de la fête se fait de retour à la maison de nos hôtes. Nooruz se fête ici entre voisins, et cette année c’est dans la maison de l’aksakal, l’aîné du voisinage, que nous sommes reçus. Dans la petite maison a été dressée une table autour de laquelle se succèdent les invités au cours de l’après-midi. Et quelle table : ses quatre mètres de longs semblent encore insuffisant pour offrir assez de surface aux montagnes de beignets, gâteaux, salades, confitures, fruits, etc, offerts aux convives. Chacun à son tour entre, salue les hôtes, s’accroupit sur les tapis, et doit partager le thé et quelques victuailles pour honorer les maîtres de maison. Quant à nous, nous aurons la chance de prendre part à un tour de chant et à une tournée de chorpo, le bouillon gras du mouton en train de cuire pour le grand repas du soir.

C’est ensuite dehors que se poursuit la fête, avec les jeux traditionnels : concours de tir à la corde, de chant et de danse, une vrai kermesse à la kirghize. Grand moment, le jeu qui consiste à essayer de renverser, les yeux bandés, à tâtons et armé d’un long bâton, une bouteille posée sur le sol à une douzaine de pas droit devant… Enfants et adultes savourent le spectacles des fransouskis essayer de taper à plusieurs mètres de la bouteille !

Et l’on repasse à table, salades, plov et besh-barmak, que l’on dévore à pleine main dans le grand plat collectif. Le tout copieusement arrosé à la vodka, cela va sans dire, à raison d’autant de toasts qu’il y a de convives à table. On gardera en mémoire les vœux arrosés de l’aksakal qui nous recevait, et qui, bien en verve après cette après-midi festive, nous souhaita « le bonheur comme on l’entend ici, qu’il y ait toujours beaucoup d’enfants devant la maison et beaucoup de moutons derrière »…

Camille et Mathilde

06 avril 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

« La terre tremble, et tu t’essuies la bouche » (H-F. Thiéfaine, rien à voir)

Des questions sur le fameux tremblement de terre en Ouzbékistan, ressenti le 8 janvier dernier, lors de notre voyage en Ouzbékistan … Certains de nos lecteurs se sont étonnés de ce séïsme, évalué entre 6 et 8 sur l’échelle de Richter, sans que l’on ne constate de dégâts massifs. L’épicentre se trouvait à Batken au Kirghizistan, près de la frontière ouzbèke, à une quarantaine de kilomètres de Kokand où nous nous trouvions à ce moment-là. Dans notre chambre d’hôtel, nous n’en avons ressenti qu’une secousse déjà atténuée.

Dans la région de Batken, le gouvernement a fait état de 3700 maisons endommagées, ainsi que 68 écoles et une trentaine de bâtiments administratifs ou hospitaliers eux aussi partiellement détruits. Pour autant, pas de mort ni de blessés… Assez peu de dégâts à priori si l’on compare en effet avec les derniers tremblements de terre dévastateurs d’Asie du Sud-Est. La « faiblesse » des dommages matériels lors de ce tremblement de terre s’explique par le fait qu’il y a peu d’infrastructures à Batken, d’immeubles, de ponts… Seulement des habitations sommaires en bois ou en briques de terre séchée, sans étage. La région de Batken, la corne sud-ouest du Kirghizistan, est l’une des plus pauvres, et des moins peuplées du pays. D’où l’absence de dégâts humains, en comparaison là encore avec l’Indonésie par exemple.

Enfin, l’information circule mal dans cette partie du pays, en raison de son enclavement, coincée entre Ousbékistan et Tadjikistan. Les conséquences de ce tremblement de terre sont longtemps restées floues, et peut-être les dégâts ont-ils été mal ou sous-évalués. Des programmes humanitaires d’aide aux victimes ont été mis en place tardivement par le gouvernement, les Etats-Unis et la Russie ont débloqué près de 200 000 dollars pour subvenir aux premiers besoins : une réponse qui semble a la mesure du séïsme, notable

mais loin d’être d’une ampleur humaine exceptionnelle.

En Asie centrale, la terre tremble, et de plus en plus : depuis notre arrivée, pas moins de quatre séïsmes supérieurs à un niveau 4 sur l’échelle de Richter ont été comptabilisés, et ressentis à Bishkek. Deux seulement ont causé des dégâts, mais cette multiplication des épisodes sismiques dans la région inquiète scientifiques, populations et autorités… Plus de précisions sur cette question dans nos prochains travaux…

Mathilde et Camille.

05 avril 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

Hécatombe de moutons dans la vallée d’Ak Say… EPISODE 3

Ayant perdu la trace du loup, nous reprenons celle du « vieux », l’aksakal de la vallée. Nous le découvrons au bout du bout, après avoir croisé deux jeunes bergers à moutons qui nous indiquent le chemin. Kakiling, 11 fils et filles, 31 petits enfants, nous reçoit avec chaleur, comme les autres. Frère d’un dissident ayant fui vers la Chine, il vit depuis 1960 dans la  vallée.Aksakal_paint Il a connu l’ère soviétique, l’effondrement de l’URSS et l’entrée en scène d’un pouvoir kirghize indépendant. La vallée, il l’a connu surpeuplée et se souvient de la fuite des élèveurs au début des années 90. « Nous sommes restés, mon voisin et moi. Au village, on disait que nous avions été mangés par les loups », se souvient Kakilim. Sont restés autour de lui sa femme et quelques fils et belles-filles. La vieille dame aime à se rappeler les 29 enfants qu’elle a aidé à accoucher, pour cause d’hôpital trop éloigné. Les deux vieux n’ont que de bons souvenirs de l’époque soviétique, mais assurent avoir toujours une « belle vie ». Nous trinquons donc au Koumis, le fameux lait de jument fermenté, le premier depuis notre arrivée. « Il est meilleur en été » : nous promettons de revenir.

Retour chez Tourganali, où, pris en affection par nos hôtes, nous sommes initiés aux gestes quotidiens des bergers : rassemblement du troupeau de yacks, préparation du repas, le tout nous amenant encore tard dans la nuit. Les enfants dorment déjà sous les pelisses. Tourganali nous raconte la vie sous la yourte durant l’été, lorsque les bergers abandonnent maisons et hivernages pour s’installer plus bas dans la vallée, ou l’herbe nouvelle est prête à être brouttée.

Paysage_centre_paintLe lendemain, nous attendons. En prévision du marché aux bestiaux d’At Bashy, un camion est venu charger une vingtaine de moutons. Nous devons attendre qu’il aille chercher sa précieuse cargaison dans une bergerie voisine pour redescendre dans son sillage, la route étant enneigée. La journée s’étire, en compagnie des femmes, dont les langues doucement se délient. Les histoires d’amour chantées la veille autour du repas prennent une autre teinte au gré des confidences… Kiris, la jeune et jolie femme de Lakhat, a été enlevée il y 6 ans, selon une tradition kirghize encore tenace. En vacances chez sa tante dans la vallée d’Ak Say, elle n’en est plus jamais repartie. Elle rit et danse, avoue avoir « eu un peu peur » lors de son mariage forcé, sous la yourte, mais assure qu’elle est heureuse à présent.

Les hommes réaparaissent, nous avalons un dernier mouton, le troisième en trois jours, et repartons. Finalement, les passagers du camion s’arrêteront au passage du premier poste de contrôle, invités par les soldats à boire quelques verres. Nous repartons seuls. A peine le col franchi, un peu après minuit, nous voyons surgir dans la nuit un jeune garçon suivi d’un homme en uniforme militaire. Leur voiture est bloquée dans la neige 200 mètres plus bas. Le frère du conduteur est malade, les frais d’hospitalisation coûtent cher, et l’homme va chercher un de ses yack à Ak Say pour le vendre au marché du lendemain matin. Nous l’aidons à denneiger et poussons la voiture une fois, deux fois, dix fois, en vain. Son 4x4 Lada « Niva » ne passe pas. Les hommes de notre équipage le conjurent de faire demi-tour, d’essayer un autre chemin, rien n’y fait. Il veut passer, et par cette route, car il est pressé.  La neige continue de tomber, il nous faut repartir. Nous le laissons là, un peu retournés par cette rencontre.

Arrivée à At Bashy au milieu de la nuit. Après 5 heures de sommeil, nous regardons le soleil se lever sur les montagnes, vues d’en bas…

Camille et Mathilde

22 mars 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (4)

Hécatombe de moutons dans la vallée d’Ak Say… EPISODE #2

Maison_mouton_paintRetour dans la bergerie, l’ambiance s’échauffe. Le Beshbarmak est l’occasion de toute une série de rituels, qui rappelle les hiérarchies kirghizes. Toutes les parties du mouton tué le matin même sont cuites dans un grand chaudron et la distribution des morceaux est un art ; les plus belles pièces sont offertes aux invités et aux plus âgés, avec une préférence pour les femmes. Les jeunes s’occupent de dépiauter la viande, que nous mangerons ensuite avec des pâtes cuites dans le bouillon.

Son morceau devant soi, pas question de l’avaler en entier. Il faut en grignoter un bout, puis redistribuer à son tour. Le reste sera placé dans un sac avec des borsoks, et l’invité repartira avec. Tout se mange avec les cinq doigts, ce qui est la traduction littérale de « besh barmak ». Interdiction de poser un bout d’orteil sur la nappe posée à nos pieds, impossible de prendre l’assiette que l'on nous tend, difficile de refuser le bouillon garni de bouts de gras ou d’intestin... Nous rentrons dormir chez Aïbek, le cœur chaud et le ventre plein. Chaque jour, nous ferons ainsi honneur à un nouveau mouton, sacrifié en l’honneur des invités venus de si loin.

Le lendemain, nous nous enfonçons un peu plus dans la vallée d’Ak Say. En fait de vallée, c’est plutôt une steppe immense, parsemée de vallons, de canyons rouges, de sommets. Nous déboulons sur les pistes, remerciant chaque jour Oké pour ses talents de pilote. Pas une ombre de vie sur des kilomètres, les bergers sont éparpillés dans cette immensité, avec comme seules limites celles des hivernages et des pâturages d’été. La maison de Tourganali, au cœur d’un ancien kolkhoze dont il ne reste qu'un enclos en béton et quelques bâtiments délabrés, s’appuie sur une falaise et fait face à une étendue d’eau glacée. Décor austère pour la centaine de yacks dont s’occupe Tourguenali. Ces grosses vaches à poils longs se régalent de l’herbe « qualité supérieure » d’Ak Say. Véritables bêtes de montagnes : plus le climat est froid et plus les yacks sont  à l’aise. Le troupeau part paître dans les hauteurs, et nous quittons Tourganali à la recherche de l’ancêtre de la vallée, l’ « aksakal », qui en est à son 47ème hiver à Ak Say.

Troupeau_yacks_paintSoudain, à l’écart de la piste, un loup ! La voiture stoppe, les bergers descendent, ça tourne et ça crie… Le vieux prédateur a attaqué l’un des yacks de Tourganali. Le combat a lieu à quelques cent mètres de nous. Nous nous faisons débarquer sur la glace, la voiture repart dans l’autre sens, à la recherche d’un fusil. Il faut empêcher l’animal de s’en prendre au reste du troupeau. Le loup, apeuré, a lâché sa proie. Celle-ci se relève, sanguinolante, et repart doucement vers la bergerie. Nous resterons une demi-heure dans le froid à regarder les bergers devenus chasseurs pourchasser le loup dans les collines environnantes. Tourganali, à cheval, vieilles jumelles sur le nez, nous dépasse, me jette une pelisse contre le froid et repart, à brides rabattues, surveiller la course poursuite entre la voiture et le cheval. Peine perdue. Ils ne l’auront pas, mais l’histoire va nous accompagner jusqu’au retour à At-Bashy. C’est que le loup est l’ennemi numéro un des bergers kirghizes car il pulule et s’attaque sans vergogne aux troupeaux. Le gouvernement offre même une prime à qui tue un loup. Les bergers, hilares, nous écouteront raconter plus tard dans la soirée le plan mis en place pour protéger la trentaine de loups français.

Mathilde et Camille

20 mars 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

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