Sur la route avec nous

Boukhara, ville sainte

Nous quittons Khiva pour Ourgench, ville transit. Après une heure d'apres négociations dans un froid glacial, nous grimpons enfin à bord d’un « Car de l’Ouanne » (1), vieil autobus récupéré en France et qui connaît une seconde vie en Ouzbékistan. Divertis par les clips de pop orientale diffuses sur la tele du bus, nous attendons encore une heure que le véhicule se remplisse.

Boukhara_sunset_2Démarrage, je lâche un cri de joie qui fait sourire mes compagnons de voyage... Inapproprié, car nous stoppons un quart d’heure plus tard. Le bus est en panne, les taxistes d’Ourgench, rigolards, nous avaient prévenu… Un autre véhicule, cette fois-ci aux couleurs du Conseil général de l’Isère (hasard ou vraie filière ?), fait le relais. Seul hic, il est plus petit et tout le monde ne pourra s’asseoir. Qu’à cela ne tienne, nous nous hissons sur un coffre à l’avant, recouvert de Töshoks, sorte de gros matelas bariolés. On part donc finalement, mais dans un confort hasardeux, que nous paierons au cours du voyage… Et pas n'importe quel voyage: neuf heures, entassés dans un bus de deuxieme main (rendons a posteriori hommage aux services techniques du CG isérois pour avoir maintenu en forme son ancien pensionnaire), bien décidés a traverser dans la nuit, sur et sous la neige et donc a une moyenne de 30 km/h, le désert du Kysyl-kum. Le genre de situation qui, avec un peu de recul, vous rappelle que vous etes bien peu de chose...

Les contrôles-barrières se succèdent, un seul policier, imbibé de Boukhara_arcades vodka, vérifiera nos passeports, poussé par une babouchka que la présence d'étrangers dans son bus agace manifestement. Une petite bande se forme autour d’elle, nous regardant d’un air entendu et moqueur. Le reste du bus ignore cette xénophobie latente. Un nan, galette fait-maison circule pour nous dans le bus. Les généreuses donatrices, deux copines rieuses, nous jettent des clins d’œils complices.

Le désert blanc défile, un arrêt, enfin. Au loin, un enchevetrement d’antennes forme un décor surréaliste. Les hommes pissent le nez au vent, sans meme chercher a se cacher derriere muret ou arbuste. Camille les imite, reproduisant le petit rituel de la main passée sur la neige pour se nettoyer. Nous rejoignons les buissons des femmes. Vite, elles retroussent leurs lourdes jupes, descendent leurs pantalons colorés et, les fesses à l’air, se soulagent de ces heures d’attentes. Nous nous dépêchons de faire de même, maintenant habituées à cette impudeur collective.

Boukhara se dévoilera de nuit, à travers les vitres d’un taxi. Nous atterissons sans le savoir dans le quartier juif et une synagogue est notre voisine. Au petit matin, nous découvrirons des maisons de pierre couleur ocre, aux toits plats. Les mosquées et medressas sont éparpillées dans toute la ville, au gré des rues tortueuses. Khiva la ville musée nous semble bien loin.

Boukhara, ancienne capitale du pays et centre religieux historique, tourne autour de son immense mosquee centrale, qui fait face a une école coranique encore en activité. Si nous visitons l'esplanade superbe dans la lumiere rasante, le lieu de culte ferme ses portes aux femmes et aux non-musulmans. Nous nous "vengerons" en prenant de la hauteur, afin d'admirer la ville au soleil couchant, du haut de l'Arcq, l'immense palais de l'ancien khan (seigneur) de Boukhara. Les russes puis les sovietiques ont detruit l'interieur de l'edifice et les murailles ne protegent plus qu'un terrain vague, surplombant la ville.

Premiere approche aussi de l'absurdité ouzbeke. Impossible de trouver des sums, monnaie officielle, dans les bureaux de change de la ville. Nous tentons de changer nos devises au siege local de la banque nationale. Ici aussi, les caisses et les bureaux sont vides. Le policier surveillant l'entrée nous conseillera le plus naturellement du monde d'essayer le marche noir. avant de se raviserquelques secondes plus tard: c 'est finalement lui-meme qui fera la transaction, sortant des liasses de billets de sa veste d'uniforme. En Ouzbekistan, l'argent, comme le reste, se trouve au marche, et pas a la banque.

Boukhara_cour_interieure Nous quittons Boukhara apres avoir pris notre petit dejeuner, pain, kéfir (sorte de yahourt acide et crémeux) et thé noir, dans une tchaikana (maison de thé) de quartier. La vieille batisse accueille de vieux monsieurs qui semblent y passer toutes leurs journées. Assis ou allongés, ils palabrent en avalant des litres de thé fumant et en chiquant un tabac que l'on sait souvent melé d'autres drogues. Un vrai petit club anglais, avec sa hierarchie implicite, ses figures qui font autorité, et la cour de ceux qui essayent de se rapprocher de la table ou l'on potine.

La encore, que des hommes. Une vieille dame, a la peau tres brune, a semble-t'il recu le privilege de profiter d'un coin de la salle. Elle rigole doucement dans la pénombre. L'un de nos voisins, surpris par notre présence, entame une conversation amicale. Il touche son nez, mimant notre Charles de Gaulle national. D'un signe de tete, et d'une main sur le coeur, il salue notre depart. N'en deplaise a la "dame du bus", nous sommes définitivement charmés par les vieux messieurs ouzbekes et le rythme de la vie d'ici...

Mathilde et Camille

(1) Où est donc située l’Ouanne ? Le premier de nos lecteurs qui répondra à cette interrogation recevra un cadeau gracieusement offert par les animateurs du site www.journalistes-asiecentrale.net...

18 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (2)

Ouzbekistan episode 2: Khiva

En plein coeur du Khorezm, ancien berceau de civilisation persanne en Asie centrale, a quelques encablures de la frontiere turkmene, en arrivant a Khiva, on touche enfin au mythique... Depuis des annees trottent dans nos esprits les images des bastions dodus et des murailles en pise de la vieille cite. Et les voila face a nous, au moment ou l'on descend du taxi qui nous a amene depuis la gare d'Ourgentch... Alors bien sur, le coucher de soleil est toujours moins dore en vrai, et la taille de l'edifice  n'est pas tout a fait celle que l'on imaginait en reve... Mais tout de meme, pas question de bouder son plaisir, une fois le prix de l'hotel aprement negocie, au moment de passer la porte d'enceinte et de penetrer dans la ville. Img_9227

C'est la que le reel vous rattrape definitivement: la magie opere, certes, mais la magie a un cout. Si le coeur de Khiva, la citadelle d'Ichon Kalaa et ses dizaines de splendides mausoles, medressas, mosquees et palais orientaux ont survecu, c'est parce que le site a ete classe au patrimoine mondial de l'UNESCO il y a 15 ans. Et donc largement restaure. C'est donc dans une ville-musee que nous penetrons: dans les rues desertees par les touristes, rares sont les passants afrontant le vent glacial qui s'engouffre entre les hautes murailles des palais. Dans les cours de medressas, au pied des splendides minarets de cette antique capitale de l'Islam, nous ne croisons d'abord que des femmes etonnament polyglottes et souriantes qui ne comptent pas laisser trois touristes hivernaux sans leur avoir montre leur echoppe, artisanat local, bois scuplte, ceramiques et tapis brodes... Il faut dire que l'architecture des medressas s'y prete idealement: le schema est simple, une grande cour carree, autour de laquelle s'ouvrent des dizaines de cellules exigues et sombre, chacune fermee par une belle porte de bois ouvrage. C'est la que chaque femme de Khiva (nous constaterons invariablement la meme chose a Samarcande et Boukhara) tient son petit commerce, vers lequel elle compte bien vous rabattre.

Ce doit etre ca le tourisme comme ressource economique, developpe dans un schema qui vise a faire participer les populations locales. N'empeche que le premier jour, on en vient a se demander si on n'a pas paye l'entree d'un supermarche geant.

Img_9230 Mais bien vite tout cela passe au second plan, tant la splendeur du spectacle offert par Khiva reprend le dessus. Il suffit que le soleil pointe ses rayons pour que tout change de visage. Alors oui, la vraiment on comprend ce que l'on est venu chercher ici. Impression confirmee en oubliant un peu la longue liste des monuments a "faire", et en se balladant au gre des rues, entre les ogives des tombeaux, derriere les porches des petites medressas a peine decorees ou les artisans de la ville ont installe leurs ateliers. Bien sur, l'illusion d'etre le premier a pousser une porte ou a parler a un vieil ousbek ne dure pas longtemps, tant on sent que la ville voit passer des milliers de touristes chaque annee, mais tout de meme, on s'y croirait vraiment. Les ruelles tortueuses entre les maisons  aux toits plats, les enchevetrements de murailles et de coupoles , tout ce qui nous manquait a Bishkek est la, cet echo de l'histoire, ce patrimoine culturel et ce profond parfum de Perse et d'Orient.

Un detour au bazar de la ville, presque aussi tourbillonnant en cette veille de la Saint-Sylvestre queImg_9377 le Printemps Haussman le 23 decembre, bien que pauvre et mal achalande, une escalade de minaret pour prendre de la hauteur et savourer le panorama... Tant pis pour les marchands du temple et les "extra-tickets", supplements de prix demandes a l'entree de certains monuments, Khiva nous a conquis. De quoi alimenter de longs debats sur le tourisme durable, responsable et economiquement viable...

Camille et Mathilde

16 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (2)

Ouzbekistan, premiere... dans le train vers Khiva

Racontons donc ce voyage...Img_9143

Partis de Bishkek le 28 decembre, nous arrivons a la frontiere kazhake-ouzbeke au matin. Ce passage de frontiere-la est memorable : de partout, la foule pousse, les babouchkas jouant des coudes avec une force incroyable. La police sur place ne fait rien pour empecher le flot, amplifiant meme le phenomene par des barrieres absurdes... Du coup, dans la bataille des baluchons et des petites charettes pleine de marchandises (ca commerce dur), nous passons presque inapercus.

Pluie sur Taschkent, la capitale de l"Ouzbekistan. Nous avons cinq heures a attendre avant le depart du train pour Khiva, premiere grande etape de notre voyage. Nous parcourons le musee des beaux arts, habituel cube gris des ex-capitales sovietiques, desormais familier. ll est beau mais vide, tout comme le sont les rues de la metropole. Nous avons hate de quitter ces avenues austeres, pour nous plonger dans l'Ouzbekistan ancestral.

Depart du train, pour 21 heures de voyages. Nous avons en tete la traversee des steppes ouzbekes et kazakhes racontee par Ella Maillard, et apprehondons quelque peu ces longues heures a passer dans ce train qui parait pris d'assaut par les voyageurs. Nous avons du, bien malgre nous, prendre la premiere classe, la faute a notre arrivee tardive. La somme reste modique. A peine un pied dans le premier wagon, nous sommes rassures... Le voyage va etre tres confortable. Tapis au sol, samovars fumants alimentes au charbon, compartiment coquets et douillets, et, luxe supreme dans ce rude hiver, un service a the typiquement ouzbeke, pose sur une jolie nappe blanche. Dans notre presque cabine, nous faisons la connaissance de Narguiza et de son fils Rai Ran. La maman, qui fait du "business" entre la vallee du Ferghana et la region d'Ourghench, nous invite a partager son repas. Un enorme ouzbek passe une tete a travers la porte coulissante en bois de notre compartiment... Service de cabine, il nous apporte draps et couvertures pour la nuit.

Nous parcourons maintenant le Kyzylkum, le desert blanc, en direction de l'extreme ouest du pays. Notre train, veritable auberge roulante, ne nous laisse pas une seconde d'ennui. Plusieurs curieux, dont Marx (on ne se refait pas) viennent faire la causette et ereinter notre russe timide. Camille et moi partons a la decouverte du train...

Partout, les portes sont ouvertes, les familles ont chausse leurs chaussons et installe leur table de repas. De la musique s'echappe, des odeurs aussi. Je m'imisce dans une des cabines, le temps de faire connaissance et de tenter de photographier cette impression de confort absolu. Difficile... Mais je fais quand meme la causette.Img_9158

Nous debouchons sur le wagon-restaurant. Que des hommes, largement entames par la wodka. Camille sympathise avec les controleurs pendant qu'un jeune militaire me fait une place. Je suis la seule femme du wagon, avec la serveuse.

Visite egalement de la deuxieme classe, ou  les voyageurs s'entassent sur des lits surperposes. Mais la encore, on joue aux cartes, on grignote, et on regarde passer le sable jaune, rarement trouble  par quelques hameaux. 

Descente du train a 11 h, apres un autre repas en commun... frais et dispos pour entamer la decouverte de la belle Khiva.

Mathilde

15 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Bonne annee... a suivre !

Cinq jours que l'on a quitte Bishkek pour explorer l'Ouzbekistan voisin. Pas facile dans ces conditions de tenir un carnet de route regulier en ligne... Et pourtant, pourtant, des choses a raconter, il yRetouchee en a tellement ! Alors en attendant, on les consigne dans des carnets, on remplit des cases entieres de nos  cerveaux congeles d'images, de moments et d'emotions qui rechauffent. Et promis, des que l'on regagne Bishkek, les notes pleuvront: pele-mele, les beautes troubles de Khiva, Boukhara, Samarcande, les ouzbekes, le desert du Kizil-Koum, la vallee du Ferghana...
De quoi commencer 2007 regonfles a bloc, avec, toujours, l'ambition de vous faire partager le plaisir que nous avons a decouvrir cette Asie centrale decidemment riche, si riche !
 

03 janvier 2007 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (3)

Kiosques de rue

Img_9026Royaume du commerce parallele, les rues du Kirghizistan attirent des dizaines et des dizaines de petits kiosques, vendant confiseries, cigarettes a l'unite, pommes, gadgets, jouets, cahiers... Le plus souvent, sous un parasol emballe de plastique pour se proteger du froid, ce sont des "babouchkas" (grand-meres) qui tiennent la boutique. Les retraites sont maigres ou inexistantes au Kirghizistan et les personnes agees doivent compter sur la solidarite familiale, qui marche generalement tres bien. Dans chaque famille kirghize, l'un des enfants est designe pour s'occuper de ses parents (le fils cadet generalement). Ces derniers s'occupent, dans une juste repartition des taches, des enfants en bas age. Mais pour les quelques-uns ou quelques-unes laissees pour compte, c'est balayage des ordures, deblayage de neige, tournee des menages ou vente de rue.
Ici, a la sortie d'une ecole, la vendeuse eclaire son etal a la bougie...

22 décembre 2006 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Les fantômes russes de l’Opéra de Bishkek

Sur_la_scene Au plafond de l’Opéra de Bishkek, les motifs traditionnels kirghizes enserrent une faucille et un marteau, sur fond doré. Bienvenue dans un théâtre centrasiatique, mâtiné d’URSS. Créé dans les années 40, l’édifice rompt avec l’austérité architecturale de la capitale et sa grisaille. A l’intérieur du bâtiment, le velours rouge des sièges et du rideau réchauffe les habitants pris par l’hiver. Mais ils se font rares, les visiteurs. Depuis l’indépendance et la perte d’influence des russes, l’opéra n’a plus la côte. Les Kirghizes poussent rarement les lourdes portes du théâtre, ce petit morceau de Russie au cœur d’un pays émancipé du giron soviétique depuis déjà 15 ans.

Il est midi, l’heure de la pause pour les musiciens en répétition. Koubanitibiek est premier hautbois. Dans la fosse d’orchestre, il profite du calme provisoire qui règne dans l’Opéra. « Bien sûr, beaucoup de choses ont changé ici. HautboisJe suis musicien pour l’Opéra national depuis 10 ans. Avant, beaucoup de monde se déplaçait, surtout pour voir les stars venues de toute l’URSS ». Du bout des lèvres, le musicien évoque les difficultés de l’institution : « C’est toujours le même répertoire, à part deux ou trois pièces qui changent par année. C’est que nous manquons de moyens pour acheter les décors, les costumes, les partitions. Et pour dire vrai, je gagne peu à travailler ici. Mais je reste, pour le prestige ».

Nurmat, l’un des deux chefs d’orchestre salariés du théâtre, est plus critique sur la situation de son Opéra. « C’est la crise, maintenant. Il n’y a pas de financement et le gouvernement kirghize ne soutient pas le théâtre. Moi, je gagne à peu près 50 euros par mois [à peine 16 dollars de plus que le salaire moyen]. Alors que cela fait 22 ans que je suis musicien !».

Il y a trente ou quarante ans, les chefs d’orchestres arrivaient de Russie, pour développer la tradition de l’opéra à Bishkek, pays vierge en la matière. Ces derniers programmaient  des opéras russes. Et venaient au spectacle des Russes seulement. « Et puis peu à peu, tout le monde s’est mis à venir à l’opéra et on a ouvert un institut musical à Bishkek ». Dans le même temps, le pays s’est vidé de son élite musicale, au profit de la Russie.

« Grâce à l’école de l’opéra russe, la nouvelle génération de musiciens classiques kirghizes est née, reconnaît le chef. Mais je pense qu’aujourd’hui, sans soutien du gouvernement, l’opéra ne se perdurera  pas. Le niveau des musiciens est très faible ». Et l’histoire se répète. Aujourd’hui encore, les meilleurs d’entre eux partent travailler au Kazakhstan.

Trois étages au-dessus de la scène, Larissa et Lida prennent le thé, dans une minuscule pièce où s’entassent robes 19ème et vestes d’officiers. « La saison dure de début octobre à mai, explique Larissa. Ce que je préfère ? La flûte enchantée de Mozart et… Tchékhov bien sur ! » Impossible de dénombrer les costumes et tutus de danseuses qui s’entasse dans les pièces de ce couloir. Mais là aussi, la création est limitée. « On réutilise les mêmes chaque année », admet la plus âgées des petites mains.

50 ans d'Opera

Au cinquième étage de l’imposant bâtiment, d’une rangée de salles privées s’échappent les voix des chanteurs et chanteuses de l’Opéra. Le plus célèbre d’entre eux, le ténor Ceïtogchev Tokgonameb, égocentrique et facétieux, raconte son passé glorieux. « J’avais 19 ans quand je suis arrivé au théâtre. Et je chante depuis 50 ans ». Né dans un village de la région de Panfilovka, à l’ouest de la capitale, Ceïtogchev est le cadet d’une famille de quatorze enfants. « Tous sont morts de faim pendant la deuxième guerre mondiale et je suis resté seul. Ce don que m’a donné Dieu, le chant, je crois que c’est à cause du malheur tombé sur ma famille ». Chanteur_tenor A son intention de chanter pour l’Opéra, ses voisins répondent par des ricanements. A l’époque, point d’opéra dans les campagnes kirghizes. « Je suis arrivé à Bishkek, sans parler un mot de russe, et sans autorisation pour entrer à l’Opéra. Tout le monde a pensé que j’étais fou ! Et puis j’ai chanté et tout le monde a applaudi. Ils m’ont permis de rester ici. J’ai appris le solfège, l’harmonie,  j’ai fini par intégrer le cœur puis être chanteur soliste ». Le jeune ténor alors part en tournée dans toute l’URSS, « j’ai même chanté au Bolchoï de Moscou ! », puis à travers le monde. « Oui, l’URSS faisait voyager les hommes talentueux… ».

Habile à faire revivre la grande époque,  Ceïtogchev Tokgonameb est moins disert quand il s’agit d’évoquer les difficultés actuelles de l’Opéra : « Il y a moins de public, c’est vrai. Chacun a ses soucis, et l’intérêt est moindre. Et maintenant, il n’y a plus d’argent pour les décors, les costumes… Et bien sûr, la nouvelle génération comprend moins bien l’opéra classique ». Il veut croire en le nouveau gouvernement, qui, selon lui, « fera toujours attention à ce théâtre ». Et nous quitte sur une pirouette : « Beaucoup de gens à Bishkek me connaissent encore… Et s’ils ne me connaissent pas, ils devraient ! ».

Mathilde GOANEC

09 décembre 2006 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

Carnet en images #2

Parce que le premier commencait a etre serieusement encombre, nous inaugurons tres officiellement notre deuxieme "carnet en images", pour un plus grand confort pour nos lecteurs-bloggeurs...Les premieres photos restent bien evidemment disponibles en ligne.

A suivre donc, sur "carnet en images #2.

28 novembre 2006 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (1)

Conversation sur le temps...

Img_8597 TABARNAK !!! Y fait frette en hostie icitte !

C'est l'hiver, calvaire,

ca glisse, calisse,

mets tes claques, tabarnak,

ca glisse en simonak !

                             Comptine quebecoise...

Tout ca pour dire que le climat de ces trois derniers jours nous rappelle des choses.

Les marchroutkas derapent sur les chaussees gelees, la neige a transforme (et embelli) la ville. Tout est plus sourd, propre, apaisant... Sauf les jeux des enfants devant l'ecole voisine de notre appartement ! Mais la neige qui s'installe, c'est aussi beaucoup de complications, de retards aux rendez-vous, les courses au bazar deviennent des expeditions dans le grand-Nord... Bishkek ou Quebec, le froid est peut-etre le meme, mais il est sans doute plus dur a vivre ici, ou la vie est bien moins organisee.

24 novembre 2006 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

La tete dans le four

Les petites heures du jour sont les meilleures pour rentrer dans l’intimité d’un four à lipiotchki… Rendez-vous pris depuis la veille, nous toquons donc à l’heure dite à la petite lucarne abritant l’atelier.
Azyl_a_lampoule_1
Azyl, les mains dans la pâte, nous accueille d’un sourire. Il pétrit et façonne en boules de 300 grammes le mélange de farine, d’eau et de sel, à raison de 80 kilos par jour. La lumière est faible encore et la pièce est éclairée par une unique ampoule. Côté rue, le profond four en terre, rond, dit « tandoori ». De grandes flammes s’échappent de ce puits brûlant.
Une heure plus tard, Kenjégul et Dastan rentrent en scène. La jeune femme, un fichu rose sur la tête, rejoint Azyl derrière la lucarne. Entre ses doigts, en quelques gestes rapides et précis, les boules de pâtes vont devenir des lipiotchki. Elle creuse la boule en son centre, pince le bord et, pour finir, poinçonne la galette en plein cœur, de quelques coups du tampon traditionnel, le « tchékitch ». Les petits cercles de points sont la marque de fabrique des lipiotchki ; dans le passé, on dit que chaque famille possédait son propre tchékitch et son dessin caractéristique.Faconnage_fini

Dastan, lui, réceptionne la galette que lui lance Kenjégul à travers la petite fenêtre. Il l’enduit de lait, d’eau, et l’aplatit sur sa « gazina », sorte d’instrument rond et bombé. Deux ou trois rapides claques sur la pâte distendue, et le tout est enfourné, collé à même la paroi du tandoori. Et ça tient tout seul, pendant les trois minutes précises que va durer la cuisson. La pâte gonfle, dore, et il ne reste plus qu’à venir cueillir la lipiotchka avant qu’elle ne tombe au fond du four. Pour cela, Dastan utilise son « yalak », long manche terminé par une corbeille de fer. Yalak_2


Dastan, Azyl et Kenjégul fabriquent plus de 250 lipiotchki chaque matin. La plupart sont achetées, encore chaudes, par les habitants de la rue. 5 som (10 centimes d’euro) la lipiotchka. Les autres partiront, sur la bicyclette d’Azyl, vers les magasins et restaurants du quartier…

Mathilde et Camille

21 novembre 2006 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (3)

Chronique de rue

Week-end dernier, dans notre rue. Un voisin mariait sa fille et a donc, comme le veut la coutume, tué un mouton.
Img_8465_1
Les appartements « krouchtchovka* » étant trop exigus pour y cuire la bête, la préparation se fait dans la rue. Dans une grande marmite, posée sur un feu de bois, les morceaux de viande mijotent dans le bouillon. Les passants sont invités à manger un petit bout déjà cuit, et quelques beignets traditionnels. Le reste sera partagé par les convives du mariage, lors du Byshbarmak, littéralement « avec les doigts ».

Comme les enterrements, les mariages semblent confondre allégrement la sphère publique et privée, pour, cette fois, le plus grand plaisir des voisins franzuski !!


Camille et Mathilde


* On vous l’a pas déjà dit ? Le type d’immeubles dans lequel nous vivons a été imaginé à l’époque de Krouchtchev, et reproduit à l’identique dans toute l’URSS… Pas besoin de visiter longtemps quand on cherche un appartement dans ces quartiers, tous sont rigoureusement identiques. A Bishkek comme à Vladivostok ou Leningrad…


P.S : Il neige rue Koybagarova !

21 novembre 2006 dans Carnet de bord | Lien permanent | Commentaires (0)

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