Partis de Bishkek le 28 decembre, nous arrivons a la frontiere kazhake-ouzbeke au matin. Ce passage de frontiere-la est memorable : de partout, la foule pousse, les babouchkas jouant des coudes avec une force incroyable. La police sur place ne fait rien pour empecher le flot, amplifiant meme le phenomene par des barrieres absurdes... Du coup, dans la bataille des baluchons et des petites charettes pleine de marchandises (ca commerce dur), nous passons presque inapercus.
Pluie sur Taschkent, la capitale de l"Ouzbekistan. Nous avons cinq heures a attendre avant le depart du train pour Khiva, premiere grande etape de notre voyage. Nous parcourons le musee des beaux arts, habituel cube gris des ex-capitales sovietiques, desormais familier. ll est beau mais vide, tout comme le sont les rues de la metropole. Nous avons hate de quitter ces avenues austeres, pour nous plonger dans l'Ouzbekistan ancestral.
Depart du train, pour 21 heures de voyages. Nous avons en tete la traversee des steppes ouzbekes et kazakhes racontee par Ella Maillard, et apprehondons quelque peu ces longues heures a passer dans ce train qui parait pris d'assaut par les voyageurs. Nous avons du, bien malgre nous, prendre la premiere classe, la faute a notre arrivee tardive. La somme reste modique. A peine un pied dans le premier wagon, nous sommes rassures... Le voyage va etre tres confortable. Tapis au sol, samovars fumants alimentes au charbon, compartiment coquets et douillets, et, luxe supreme dans ce rude hiver, un service a the typiquement ouzbeke, pose sur une jolie nappe blanche. Dans notre presque cabine, nous faisons la connaissance de Narguiza et de son fils Rai Ran. La maman, qui fait du "business" entre la vallee du Ferghana et la region d'Ourghench, nous invite a partager son repas. Un enorme ouzbek passe une tete a travers la porte coulissante en bois de notre compartiment... Service de cabine, il nous apporte draps et couvertures pour la nuit.
Nous parcourons maintenant le Kyzylkum, le desert blanc, en direction de l'extreme ouest du pays. Notre train, veritable auberge roulante, ne nous laisse pas une seconde d'ennui. Plusieurs curieux, dont Marx (on ne se refait pas) viennent faire la causette et ereinter notre russe timide. Camille et moi partons a la decouverte du train...
Partout, les portes sont ouvertes, les familles ont chausse leurs chaussons et installe leur table de repas. De la musique s'echappe, des odeurs aussi. Je m'imisce dans une des cabines, le temps de faire connaissance et de tenter de photographier cette impression de confort absolu. Difficile... Mais je fais quand meme la causette.
Nous debouchons sur le wagon-restaurant. Que des hommes, largement entames par la wodka. Camille sympathise avec les controleurs pendant qu'un jeune militaire me fait une place. Je suis la seule femme du wagon, avec la serveuse.
Visite egalement de la deuxieme classe, ou les voyageurs s'entassent sur des lits surperposes. Mais la encore, on joue aux cartes, on grignote, et on regarde passer le sable jaune, rarement trouble par quelques hameaux.
Descente du train a 11 h, apres un autre repas en commun... frais et dispos pour entamer la decouverte de la belle Khiva.
Mathilde
Commentaires