C’est le « problème du blogging » : plus il nous arrive des choses susceptibles d’être racontées sur le blog, moins on a le temps de les écrire, forcément. Illustration ce mois dernier : nous avons disparu de la blogosphère, et pour cause, on se bouscule rue Koibagarova !
Première visite de l’été, les parents de Mathilde, avec qui nous sommes partis trois semaines en goguette dans l’est du Kirghizistan. Accompagnés de notre chauffeur, Nikolaï, et de deux de ses amis russes, Vladimir et Irina, nous avons sillonné les (mauvaises) routes du pays. Au programme, le lac Son Kul, le caravansérail de Tach Rabat, la vallée d’altitude d’Ak Saï, les verts pâturages de Bosogo, Kochkor, et pour finir, le grand lac Issyk Kul, en long, en large et en travers (ah non, pas en travers, même si l’envie de naviguer a taraudé l’équipage Goanec).
L’occasion pour nous de poser un peu le micro et le stylo, pour découvrir l’écotourisme à la mode kirghize et le farniente sur les rives des superbes lacs du pays. En compagnie de nos trois compagnons de route de nationalité russe mais de citoyenneté kirghize (la nuance est capitale), nous avons également fait un voyage dans le temps, sur l’air nostalgique du « Kagda bil sovietski soyouz…. » (« A l’époque soviétique… »). Très instructif. Les parents Goanec ont ainsi pu découvrir cette joyeuse déglingue post-indépendance que nous tentons de raconter à longueur de colonnes et sur les ondes.
Nous le savions déjà, mais le Kirghizistan est vraiment un pays magnifique constitué, rappelons-le, à plus de 60 % par des montagnes d’une altitude supérieure à 2000 mètres. Pour des bretons originaires d’un coin à + 0 mètre, comme aimait à le rappeler notre chauffeur, le dépaysement est de taille. Mention spéciale pour le fabuleux lac Son Kul, perché à 3000 mètres d’altitude, avec ses yourtes coincées au creux des vallons. A cheval, avec vue plongeante sur le lac, la notion de « grands espaces » prend tout son sens… Tach Rabat, au sud-est du pays, est l’un des anciens points de passage de la route de la soie. Un caravansérail en atteste, bien que les explications historiques sur les fonctions réelles de l’endroit fassent défaut. Selon notre docteur « es construction », Philippe G., c’est quand même « un joli petit travail d’architecture »… A voir. Nous retiendrons la petite « Cholponka », qui, en l’absence de ses parents, nous a accueilli en vraie professionnelle sous la yourte d’invité. Cela confirme notre impression : pour les enfants, le jaïloo (pâturage d’été en kirghize), est loin d’être un camp de vacances. Et pour la vision moins romantique de la chose, le travail des enfants est une réalité prégnante au Kirghizistan…
Après cette étape « historique », court passage à Ak Saï, où nous avions réalisé un reportage radio pendant quelques jours cet hiver. Emouvantes retrouvailles avec ces bergers rencontrés en mars, avalanche de thé, de chorpo (bouillon de viande) et de vodka. Bien sûr, en l’honneur des parents, on a tué un mouton, sous le regard furtif d’Allah. Puis retour vers les plaines, et arrivée sous un petit soleil sur la rive Sud d’Issyk Kul. Première baignade, elle est bonne. Nous regrimpons pour deux nuits dans une vallée alpine. Au programme, balade bucolique dans la forêt, au bord d’une rivière déchaînée.
Nikolaï nous propose enfin notre dernier frisson montagnard, avec une montée vers un col à 3838 mètres (croyez-en la technologie, le GPS l’atteste). Après la luge sur un névé au bord de la route, re-baignade quelques heures plus tard dans les eaux (presque) chaudes d’Issyk Kul. Magique Kirghizistan. Nous découvrons la côte Nord et ses anciens « pensionnats », sortes de complexes hôteliers datant de l’ère soviétique. Et comme décidemment, on s’embourgeoise, nous nous offrons pour 40 soms (moins d’un euro) le luxe de faire trempette sur la même plage que Krouchtchov, Brejnev et autres anciens dirigeants du Parti. Nous finirons notre périple entre pommiers, cerisiers et framboisiers, au milieu de l’immense verger de la « datcha » d’Irina, près de Tcholpon Ata.
Et voila comment en 16 jours et plus de 2000 kilomètres, le Kirghizistan a achevé de nous convaincre d’une chose : quoi que l’on puisse en dire sur le plan politique, historique ou économique (et il est vrai qu’on nous reproche parfois ici de ne parler que de ce qui ne va pas dans ce pays), le Kirghizistan est gâté par la nature, qui y est riche, variée, immense… Ce n’est pas pour rien qu’une blague russe raconte que c’est Dieu lui-même, ayant oublié le peuple kirghize lors de la distribution originelle des territoires, qui lui aurait finalement donné sa « datcha » personnelle, son petit paradis terrestre… Datcha divine, et villégiature préférée des apparatchiks du Comité Central, pas mal pour un pays trois fois plus petit que la France !
Mathilde et Camille
Pour les legendes... Photo 1, sous la yourte a Ak Sai ; Photo 2, les montagnes de Bosogo, a l'est du pays ; Photo 3, Camille fait l'ane dans un vallon pres d'Issyk Kul ; Photo 4, mosquee dungan de Karakol.