Astana est une ville-chantier, c’est entendu. Tout au moins sa rive gauche, où les quartiers présidentiels, ministériels, diplomatiques, ainsi que d’innombrables résidences de grand standing et autres immenses centres commerciaux, achèvent de sortir de terre là où il y a quelques années encore courrait une steppe aride.
Au centre de cette nouvelle capitale aussi symétrique que grandiloquente, se dresse la tour Baïterek, haute structure métallique qui supporte un globe doré, le tout n’étant pas sans rappeler le trophée de la coupe de monde de football, mais passons…
Autour de la place carrée qui abrite ladite tour, un autre édifice attire le regard : parmi les bâtiments diversement cubiques qui ferment l’esplanade, un œuf géant brise la symétrie ambiante. Cet œuf, c’est le futur bâtiment des Archives nationales, dont l’audacieuse construction s’achève ces derniers mois.
Déjà suffisamment remarquable en soit, l’œuf d’Astana a fait parler de lui bien avant son inauguration officielle (et c’est heureux pour les précieux et hautement inflammables documents que le lieu est voué à accueillir). Dans la nuit de lundi à mardi, sa coquille encore provisoire de bois aggloméré a pris feu, et le lendemain, c’est tout calciné que nous le retrouvions, l’ayant laissé la veille jaune et frais. De quoi gâcher un peu l’agencement pourtant archi-étudié par les meilleurs architectes d’Asie !
Et le cas n’est pas isolé dans ce chantier perpétuel qu’est Astana. En matière d’incendies, c’est le « flambant » ministère de l’économie et des transports qui fait figure de référence. Et pour cause : la tour de plus de 25 étages, allez savoir pourquoi, a été dessinée par ses architectes inspirés en forme de briquet géant, ce qui lui fit un surnom tout trouvé chez les habitants de la ville, goguenards. Mais quand un, puis deux incendies se sont successivement déclarés sur le chantier, ravageant à chaque fois une bonne partie de l’édifice, les blagues ont filé bon train.
Plus sérieusement, ces incendies qui se répètent semblent symptomatiques de la légèreté professionnelle des bâtisseurs de la nouvelle capitale kazakhe. Pour le « ministère-briquet », par exemple, c’est l’utilisation d’un matériau de couverture inflammable qui est incriminée : le produit Made in China est trois fois moins cher que l’européen, ininflammable, mais sécurité et économies font rarement bon ménage. Les projets immobiliers sont avant tout l’objet de spéculations financières, et le système de contrôle du secteur par l’Etat répond à un modèle « à l’africaine », selon les mots, diplomates mais assez explicites, d’un architecte européen qui connaît bien Astana. Difficile de s’appuyer sur des normes et un contrôle officiel quand la corruption reste monnaie courante…
Tout ça laisse bien peu de place aux soucis de sécurité à long terme… Pour tout dire, selon le même architecte, les « résidences de standing » d’Astana ne dépassent pas au final les standards HLM français. Ajoutez à cela le fait que la ville nouvelle est construite sur un terrain marécageux, et que les bâtiments pouvant atteindre jusqu’à 80 mètres sont construits sur des pilotis, des pieux qui s’enfoncent dans le sol. Sauf que ces pieux sont étudiés, comme le confirme notre expert, sur des modèles architecturaux soviétiques adaptés à des édifices de 5 à 8 étages, et non… 25 !
Entre bulle spéculative immobilière, bases mouvantes et édification hasardeuse, la nouvelle capitale kazakhe est un passionnant mais inquiétant défi aux lois physiques, urbanistiques et économiques. A quoi ressemblera la ville dans quinze, vingt ans, en particulier après la mort de son grand ordonnateur le président Noursoultan Nazarbaev ? Bien malin qui pourra le dire. Quand à nous, il nous faudra revenir d’ici là pour en juger…
franchement mais alors franchement moi cette ville, ça me donne envie d'aller voir... puis bon quand c'est mis en valeur avec de tels jeux de mot... culinaire de surcroit...vraiment ça donne envie.
d'un autre coté, ce midi j'ai mangé des andouillettes à la moutarde et je suis sur que ça vous fait envie... comme quoi. mais vous inquitez pas, je vous en garderai une, pour quand vous rentrerez.
bises
jerome
Rédigé par : jerome | 13 septembre 2007 à 23:36
juste pour savoir, est ce que vous avez des photos d'échafaudages locaux (avec des ouvriers dessus bien sur)? parce que je suppose que si le gouvernement rogne sur les matériaux de construction, la sécurité des ouvriers BTP doit etre le cadet de ses soucis.
merci
jerome
Rédigé par : jerome | 14 septembre 2007 à 16:47
Da da, nous en avons plein des photos d'echafaudages, car c'est justement sur les conditions de vie et de travail des ouvriers notamment etrangers que nous avons travaille. Nous en gardons une partie pour un papier a paraitre bientot dans un mag francais, mais on peut quand meme t'en garder une en echange d'une bonne andouillette a la moutarde...
Rédigé par : Camille et Mathilde | 15 septembre 2007 à 10:05