Arrivée dans une nouvelle ville, première étape incontournable, trouver un endroit où poser nos sacs et, accessoirement, où dormir. Les guides ne font mention que de l’hôtel soviétique de la ville, qui jouxte la gare routière.
L’hôtel est ouvert, mais n’a ni le gaz, ni l’électricité… et n’accueille donc pas de visiteurs ! Nous nous retrouvons donc sans lieu où loger, les autres hôtels du secteur étant soit en périphérie de la ville, soit carrément dans la ville voisine de Ferghana, à 25 minutes de bus plus au sud.
Et puis très simplement, comme toujours dans ces cas-là, un homme nous accoste devant l’hôtel, au moment où l’on commençait à se demander ce que nous allions faire, et nous fait comprendre qu’il peut nous trouver un hébergement, non enregistré par les autorités. Les deux hommes avec qui nous avons lié connaissance dans le bus (les traditionnelles discussions, « comment tu t’appelles, tu es marié, tu as des enfants, combien tu gagnes… »), et qui nous escortent depuis l’arrivée, semblent trouver la solution valable. On prend donc congé d’eux et l’on suit le providentiel hébergeur.
Quelques rues et un combat de coqs plus loin, nous découvrons notre résidence des deux prochaines nuits : une maison ouzbèke typique, avec sa cour carrée entourée de larges murs, son préau, son four à pain, et deux pièces d’habitation. La première est celle où vivent nos hôtes, deux femmes apparemment seules, la deuxième est celle qui nous est allouée. A l’intérieur, la simplicité ouzbèke à laquelle nous avons pris goût : une table basse, un petit poêle où s’agite une fine flamme de gaz. Et surtout, au fond de la pièce rectangulaire au sol nu, une haute pile de töshoks, les fins matelas aux motifs de velours hauts en couleurs que l’on déplie chaque soir pour en faire sa couche. Rudimentaire au premier abord, mais d’un confort inégalable, au point que nous les préférions depuis Khiva aux sommiers crevés des guesthouses.
La ville de Marghilan est tout entière tournée vers son imposant bazar, et s’étend sur le bord de la route qui traverse le sud de la vallée, l’héritière de la légendaire « Route de la soie » que nous suivons sans bien nous en rendre compte depuis Khiva. Tant vantée par la prose touristique sur la région, la fameuse route ne semble pas avoir de réelle consistance dans l’esprit des gens d’ici. L’idée de patrimoine ne fait pas le poids dans un coin du Monde où l’on a fait « table rase » du passé. Autant dire que le grand souffle de l’Histoire ne souffle plus depuis longtemps sur la tristounette Marghilan, ville passage, qui tire pourtant bien sa célébrité de sa soie ! Car de tous temps, Marghilan a été l’un des épicentres de la route de la soie, et l’on y tisse aujourd’hui encore des kilomètres d’étoffes bariolées aux motifs chevronnés traditionnels que l’on voit encore très présents dans la garde-robe des femmes .
Nous passons la matinée à visiter la fabrique de Yod-Gorlik, réputée pour être la plus traditionnelle de la ville. Du cocon au gallon de tissu, on découvre le travail des ouvrières de la fabrique, celles qui dérobent aux cocons bouillis leur précieux fil, toute la journée les mains dans l’eau chaude, mais aussi les tisseuses. Chacune devant son métier en bois peint de couleurs vives, elles répètent en rythme les gestes mécaniques qui donnent vie à la bistanclaque, cette musique caractéristique de la navette qui file entre les fils tendus, qui bute en bout de ligne, claque et repart à toute vitesse dans l’autre sens… Un plaisir pour les oreilles autant que pour les yeux du visiteur, une gymnastique savamment maîtrisée par les ouvrières…
Youssouf, notre guide, parle anglais sans problème. Normal, nous dit-il, il revient de New-York où il a organisé une exposition-vente des produits de la fabrique. Yod-Gorlik et sa soie sont réputées dans le monde entier, insiste Youssouf comme pour nous convaincre au moment de passer à la boutique…
Passage ensuite par la mosquée de la ville, à l’heure de la prière. L’affluence des croyants nous confirme que la vallée du Ferghana est une région où l’Islam tient une place essentielle. Autour du bâtiment, le bazar s’étend, bruyant et animé. Le commerce aussi occupe une grande place dans la vie des ouzbeks, ici sans doute plus qu’ailleurs…
Nous quitterons à regret notre petite chambre, froide et simple certes, mais qui nous aura permis pour quelques temps de voir de plus près la vie à l’intérieur de ces maisons ouzbèkes, ces cours que l’on devine dans l’entrebâillement des portails mais où il est si dur, pour des étrangers, de pénétrer.
ohé, les amis. j'aime vos histoires, j'aime vos photos. Et je voulais vous dire que celle qu'on voit ici "marguilan_peigne" me plaît particulièrement!
un petit bisou à tous les deux.
Rédigé par : gaid | 11 février 2007 à 11:35